ENCYCLOPEDIE-RORET DANSE AVIS. Le merite des ouvrages de l' Encyclopedie-Roret leur a valu les honneurs de la traduction, de l'imitation et de la contrefacon. Pour distinguer ce volume, il porte la signature de l'editeur, qui se reserve le droit de le faire traduire dans toutes les langues, et de poursuivre, en vertu des lois, decrets et traites internationaux, toutes contrefacons et toutes traductions faites au mepris de ses droits. Le depot legal de ce Manuel a ete fail dans le cours du mois de mars 1866, et toutes les formalites prescrites par les traites ont ete remplies dans les divers etats avec lesquels la France a conclu des conventions litteraires. MANUELS-RORET NOU'VEAU MANUEL COMPLET DE LA DANSE OU TRAITE THEORIQUE ET PRATIQUE DE CET ART DEPUIS LES TEMPS LES PLUS RECULES JUSQU'A NOS JOURS PAR BLASIS, Premier Danseur du roi d'Angleterre, et compositeur de Ballets. NOUVELLE EDITION ENTIEREMENT REFONDUE D'apres la traduction de P. Vergnaud, revue par Gardel, ET AUGMENTeE DES DANSES DE SOCIETE telles que LE QUADRILLE FRANcAIS SIMPLE ET CROISe, LE GALOP, LE LANCIER. LA VALSE, LA POLKA, LA SCHOTTISCH, LA POLKA-MAZURKE, LA REDOWA, LE COTILLON. Par M. LEMAITRE, Professeur de Danse. PARIS LIBRAIRIE ENCYCLOPeDIQUE DE RORET. RUE HAUTEFEUILLE, 12. 1866 Tous droits reserves. NOTE BIBLIOGRAPHIQUE. Le celebre Blasis avait fait paraitre d'abord en anglais un petit volume intitule: Origine et Progres de la Danse , qui fut traduit en italien par M. Velli; ensuite il completa son oeuvre par une autre publication en anglais commencee a Paris et terminee a Milan au mois d'avril 1820. Cette derniere avait pour titre Traite elementaire theorique et pratique de l'Art de la Danse, etc. ; elle fut traduite en italien par M. Grini, puis par le chevalier Valmarana. Une edition francaise parut posterieurement, dediee a feu M. F.A. Blasis, membre du Conservatoire de Naples et directeur de la section philharmonique du Museum d'instruction publique a Bordeaux. PReFACE La precedente edition du Manuel de la Danse , revue par le fameux Gardel, d'apres la traduction de M. Paul Vergnaud, renfermait en entier l'oeuvre de Blasis. Quoiqu'il nous en ait coute de ne pas conserver intacte l'oeuvre de l'artiste, nous avons du, dans l'interet meme du lecteur, tant pour restreindre le prix de l'ouvrage que pour ne pas le fatiguer a chercher ce qui l'interessait au milieu de digressions trop communes aux ouvrages anglais, nous avons du, disonsnous, elaguer tous les details etrangers a l'Art qui nous occupe. C'est ainsi que nous avons retranche certaines considerations sur l'esthetique et les beaux-arts, des traductions de morceaux litteraires assez etrangers au sujet, enfin, la description d'anciens ballets presque inconnus aujourd'hui. D'un autre cote, nous avons scrupuleusement respecte les theories de l'artiste, dans lesquelles nous avons refondu avec soin toutes les notes qui ont pu presenter un interet pour l'art de la Danse. Nous pouvons donc dire en toute assurance que la nouvelle edition que nous offrons aujourd'hui au public, contient l'essence de l'oeuvre complete de Blasis, si nous pouvons nous exprimer ainsi, coordonnee et depouillee de l'aridite qu'elle presentait dans l'edition precedente. Le plan de l'ouvrage actuel differe naturellement de l'ancien; nous avons suivi l'ordre qui nous a paru le plus logique. Apres l'histoire de la Danse depuis les temps les plus recules, jusqu'a un demi-siecle de nous (epoque que nous n'avons pas voulu depasser pour n'avoir pas a juger nos grands artistes contemporains, nous, petit professeur inconnu), nous avons considere la Danse comme exercice gymnastique, propre a assouplir les muscles chez l'enfant et a les developper chez l'adolescent. Puis, nous avons parle de l'enseignement des premiers principes, comme nous comprenons que le professeur doit les demontrer a des eleves destines plutot au monde qu'au theatre. Nous ne saurions trop recommander aux professeurs et aux eleves de ne pas glisser legerement sur ces etudes preliminaires et fondamentales, sous pretexte qu'elles ne sont que de peu d'utilite pour les Danses de societe. Ces principes ne serviraient-ils qu'a donner un maintien aise et libre a l'eleve, ils devraient encore etre enseignes. Les eleves formes de cette maniere se reconnaissent toujours dans le monde. Il eut ete logique de faire suivre notre chapitre III du chapitre V qui commence la theorie de la danse theatrale. L'eleve ayant recu les premiers principes est devenu capable de figurer sans gaucherie dans un bal, mais il n'est pas prepare a aborder la carriere d'artiste de maniere a s'y faire un nom celebre. Combien peu sont naturellement aptes a tenir ce rang eleve, et combien peu aussi s'y livrent en veritables amateurs passionnes de leur art! La tres-grande majorite des eleves que les professeurs sont appeles a former aujourd'hui ne leur demandent que de leur apprendre les Danses de Societe. Cette consideration nous a decide a faire suivre les principes par le chapitre IV special aux Danses de societe. Avec lui se termine tout ce qu'un maitre peut enseigner a des eleves qui n'ont besoin que de ne pas paraitre empruntes dans un bal. A ceux qui veulent suivre la carriere d'artiste choregraphique s'adressent les chapitres suivants, qui forment reellement la seconde partie de ce petit ouvrage. Son peu d'etendue ne nous a pas permis de le diviser ainsi a l'infini. Toutefois, ce chapitre V et les suivants ont une correlation intime avec ceux qui precedent les Danses de Societe. Les principes fondamentaux constituent la base d'un bon enseignement, tant pour les personnes du monde que pour les jeunes artistes. Quant aux Danses de Societe qui sont notre oeuvre speciale, nous avons cherche a nous rendre le plus clair possible, en conservant toute la concision desirable. Ainsi que Blasis le dit avec raison, ce n'est qu'en pratiquant que l'on devient capable de demontrer, et cette consideration nous donne l'assurance qu'on ne lira pas sans fruit notre courte description. Nous avons laisse de cote a dessein les danses abandonnees depuis quelques annees et nous n'avons pas recherche non plus ces nouveautes qui durent une saison et qui sont surannees a la saison suivante. Les danses que nous avons decrites sont les seules acceptees par l'usage au moment ou nous ecrivons; nous desirons sincerement voir leur nombre s'augmenter et nous promettons a nos lecteurs de les tenir au courant de ces nouveautes adoptees, lorsque nous publierons une nouvelle edition. NOUVEAU MANUEL COMPLET DE LA DANSE CHAPITRE PREMIER. Histoire de la danse. La musique et la danse sont presque nees avec le monde. Les Egyptiens, les Perses, les Indiens, les Juifs et les Arcadiens, parmi les nations les plus anciennes; Amphion, Orphee, Chiron, Thamyris, la prophetesse Miriam, David, etc., ainsi que les danses que les lsraelites executerent en l'honneur du veau d'or, prouvent leur antiquite. Ces deux arts furent enfin reduits a plusieurs regles et limites par des hommes ingenieux et inventifs. Moise dit que l'inventeur de la musique fut Jubal, de la famille de Cain, et que son frere, Tubalcain, etait ouvrier en fer et en bronze. Il faut donc supposer que cette idee lui fut inspiree par les coups reiteres du marteau de son frere sur la forge, dont le son le porta a composer des tons musicaux et a regler leur temps et leur cadence. Mais Macrobe et Boece donnent d'une-maniere La Danse . 1 analogue l'honneur de cette decouverte a Pythagore. Ils disent que le philosophe, passant devant une forge, remarqua les sons que rendait l'enclume quand les marteaux la frappaient en cadence, et les diverses notes, ainsi produites, lui donnerent l'idee d'inventer des regles pour l'art de la melodie. Quant a l'origine de la danse, Burette a recueilli les informations suivantes de quelques vieux auteurs. On n'est pas d'accord sur le nom et le pays de ceux qui donnerent aux Grecs les promieres lecons de cet exercice; quelques auteurs, et parmi eux Theophraste, racontent qu'un certain joueur de flute, nomme Audron, natif de Catane, en Sicile, fut le premier qui accompagna les sons de sa flute de divers mouvements du corps qui repondaient a sa musique; c'est pourquoi les anciens Grecs exprimaient le verbe danser par sikel[???]zein, voulant dire par la que la danse venait de Sicile. Lucien attribue son invention a Rhea, qui l'apprit a ses pretres, en Phrygie et dans l'ile de Crete. D'autres supposent qu'on la doit aux Romains, ou au moins qu'ils la perfectionnerent. Ce dernier peuple semblait destine par la nature a l'exercer plutot que les autres; il excellait dans les danses voluptueuses. La danse et la musique etaient plus cultivees par les Grecs que par le reste des anciens. Les Atheniens ne pouvaient s'en passer. Platon et Socrate l'approuvaient, et les Thessaliens et les Lacedemoniens la mettaient sur le meme rang qu'occupaient les beaux-arts. Cliophante, de Thebes, et Eschyie accrurent beaucoup les progres de la danse. Ce dernier l'introduisit dans ses pieces, et, en unissant tous les arts imitatifs, donna les premieres esquisses des representations theatrales. La peinture contribua beaucoup a ajouter a leurs charmes, et le pinceau d'Agatharque, sous les ordres de ce celebre auteur, traca les premiers ornements d'un theatre. Cet Agatharque ecrivit un ouvrage sur architecture de theatre, qui a du etre tres-bon et tresutile. Quelques siecles apres, quand les Romains monterent des spectacles magnifiques de la meme maniere que les Grecs, la danse obtint les suffrages de Lucien, Apulee, Martial, Seneque, etc.; elle s'executait surtout eu pantomimes, especes de spectacles inconnus aux Grecs. Ces pieces se composaient de sujets comiques ou heroiques, exprimes par des gestes et des danses. Les noms de Pylade et de Bathylle sout celebres dans l'histoire, comme executeurs fameux de cette espece de ballet, appele alors danse italique . Les Romains etaient charmes de ces pantomimes, et benirent Auguste, dont la politique savait bien qu'il etait avantageux pour lui de leur procurer de l'amusement. Les premiers Romains appelaient la danse saltatio , et les Grecs, orchesis . Salius fut le premier qui apprit aux Romains l' ars saltationis , c'est pourquoi leur premiere danse fut la salienne, qui consistait a imiter tous les gestes et les mouvements que l'homme puisse faire. C'etait dans ce genre de gymnastique que les mimes et les bouffons s'exercaient ordinairement. Suivant ce que nous avons recueilli des auteurs qui ont parle des danses de leur temps, je suis d'opinion que cette saltatio doit avoir ressemble beaucoup aux grotesques italiens, qui semblent a present presque bannis des theatres de ce pays. La corruption, qui s'introduisit dans les theatres de l'ancienne Rome, forca Trajan de les defendre entierement: c'est pourquoi on les abandonna pendant quelque temps. Apres la mort de cet empereur, ils reparurent, mais avec les memes obscenites, auxquelles ils durent leur declin. Les pontifes chretiens suivirent l'exemple de Trajan, en les defendant de nouveau. Enfin, apres quelques siecles, l'Italie moderne vit naitre Bergonzo di Botta, le restaurateur de la danse, de la musique et des divertissements. Il se signala dans la fete qu'il prepara pour Galeas, duc de Milan, au mariage de ce prince avec Isabelle d'Aragon a Tortone. Le gout et la magnificence deployes dans cette superbe fete furent imites par les principales villes d'Italie, qui semblaient empressees a participer a la restauration de ces arts agreables. L'Italie, a toutes les epoques, a ete le jardin de chaque art et de chaque science; c'est la que le Dante, Christophe Colomb, Galilee et Machiavel naquirent, et la aussi, on adora la charmante Terpsichore, sous une forme plus agreable et plus elegante que celle que l'antiquite lui accorda. Ainsi nous pouvons dire que les Italiens furent les premiers qui assujettirent les bras, les jambes et le corps a certaines regles: ces regles eurent lieu dans le seizieme siecle. Avant ce temps, ils dansaient comme les Grecs et les Romains faisaient avant eux, c'est-a-dire avec de grands sauts, des contorsions extravagantes, des mouvements sauvages et indecents, et les attitudes les plus inconvenantes. L'exercice dans la place publique etait la seule instruction que ces danseurs recevaient. Plus ces danseurs avaient de plaisir a sauter, plus ils excellaieut. La danse, comme art, n'etait alors que dans son enfance. Le gout et l'experience ayant enfin etabli des preceptes d'apres lesquels les pas, les attitudes, les mouvements furent arranges systematiquement, tout fut fait avec methode, et en harmonie avec les temps et la cadence de la musique. Les ouvrages des meilleurs sculpteurs et peintres ont servi de modeles pour atteindre la grace et l'elegance dans les diverses positions adoptees dans la danse, comme ils servirent aux Grecs et aux Romaine dans leurs spectacles muets, etc. La danse fit ainsi de grands progres, jusqu'a ce qu'on la perfectionnat et qu'on la rendit un art agreable et imitatif, surtout unie a la pantomime. On peut donner une raison de la superiorite italienne dans les jeux du theatre: c'est que les habitants de ce pays ressemblent beaucoup a leurs ancetres les Romaine, quand le cri universel etait Panem et circenses! Le gout et le style de notre decoration, le pouvoir de nos machines et le talent deploye par les acteurs d'a-present, surpassent de beaucoup les efforts des anciens. La chute de certaines puissances en Italie occasionna le declin de la danse et des ballets. Catherine de Medicis en fit les principaux ornements de sa cour. L'encouragement que les amusements sceniques recurent de Louis XIV contribua puissainment a leur culture. Ce monarque, gai et liberal, gouvernant une nation toujours devouee au plaisir, aimait surtout les ballets; il les introduisit dans toutes ses fetes, et les jardins de Versailles devinrent la scene de plus d'un spectacle de cette espece, monte sur un style de magnificence et de grandeur sans egale. Le chevalier Servandoni, fameux architecte, et peintre en perspective, offrit au public sur divers theatres une foule de pieces ou la musique, la pantomime et la mecanique etaient agreablement combinees. Il faut considerer ce Florentin comme un des principaux protecteurs des ballets de theatre. De la vint cette grandeur theatrale que les talents de plusieurs artistes successifs, et surtout ceux d'a present, ont amenee a un si haut point de perfection. Les danseurs parisiens etablirent la vraie execution gracieuse et digne, et l'ecole de danse francaise acquit sur toute l'Europe une preeminence qui a dure jusqu'a nos jours. La danse, la pantomime et la splendeur theatrae sont, de nos jours, arrivees au plus haut degre de perfection; quant a la magnificence, a la verite d'imitation des costumes et des lieux, nous citerons comme meritant au plus haut degre la palme de la perfection, l'Opera de Paris, les deux theatres de Drury-Lane et Covent-Garden a Londres, et la Scala de Milan. Malgre le gout vicieux, et meme l'ignorance que les novateurs modernes reprochent a nos peres, nous n'avons pas beaucoup perfectionne les principes de l'art. Notre execution est sans doute plus gracieuse, plus compliquee et plus hardie que celle de nos anciens maitres; mais n'est-ce pas a eux que nous devons notre preeminence? Ils nous ont procure les moyens de les surpasser, ils nous ont enseigne le chemin qui conduisait a la perfection, ils nous ont montre le but, et nous l'avons atteint. L'art de la danse a ete porte a un degre si eminent de perfection par Dauberval, Gardel, Vestris et autres artistes fameux, que Noverre, qui mourut pendant la plus belle periode connue dans les annales de Terpsichore, eut ete surpris de la rapidite de ses progres. Les danseurs du milieu du siecle dernier etaient inferieurs a ceux qui parurent vers la fin, et bien plus inferieurs encore a ceux du commencement de notre siecle. Nous ne pouvons qu'admirer la perfection a laquelle les danseurs modernes ont porte leur art; ils ont un gout plus delicat que leurs predecesseurs, et leur execution est pleine de graces et de charmes. On ne connaissait pas parmi nos anciens danseurs, ces temps perpendiculaires et ces equilibres d'un si bel effet, ces attitudes elegantes et ces arabesques enchanteresses. Cette execution energique, cette multiplicite de pas, cette variete d'enchainements et de pirouettes n'etaient pas alors en pratique; et l'art s'elevant, depourvu de ces embellissements compliques, renfermait le danseur dans les limites etroites de la simplicite. Nous devons convenir cependant, en faveur des anciens maitres, qu'ils nous surpassaient daus le genre serieux et grave, et que Dupre et Vestris l'aine etaient les modeles les plus parfaits de ce genre estime de danse, dans lequel ils n'ont ete egales que par un tres-petit nombre de leurs successeurs. Il est vrai qu'ils ne possedaient pas cette execution diversifiee, cette abondance de pas et cette variete de mouvements maintenant en vogue, mais ils etaient toujours extremement corrects dans tout ce qu'ils faisaient. A present, l'art de la danse est devenu si complique, et chaque danseur cultive avec ardeur tant de branches differentes, qu'il est difficile qu'il reussisse completement dans une seule. CHAPITRE II. Utilite de la danse . Les plaisirs de la danse sont universellement connus, au moins pour ceux qui la pratiquent; on ne peut appeler les autres de bons juges. Mais elle est aussi d'une grande utilite sous le rapport gymnastique et hygienique. Ce n'est pas le plus petit de ses avantages, ni celui qui excite le moins d'interet. La danse etait regardee, ainsi que la musique, comme un objet de beaucoup d'importance par les anciens. La religion la reclamait comme un de ces principaux ornements, dans toutes les occasions solennelles, et on ne donnait jamais de fetes sans l'unir aux autres ceremonies ou amusements. L'Ecriture sainte en parle dans plusieurs passages. Non seulement on la croyait tres-honorable, mais, comme l'observent Pariset et Villeneuve, elle fut l'objet de beaucoup de lois faites par plusieurs legislateurs anciens, qui l'introduisirent dans l'education comme moyen de donner de la force aux muscles et aux nerfs, de conserver l'agilite, et de developper la grace du corps humain. Tout le corps se meut plus facilement, et acquiert une apparence plus aisee et plus agreable. Les epaules et les bras sont jetes en arriere, les membres inferieurs acquierent plus de force et d'elasticite, les masses musculaires des cuisses, des hanches et des jambes, sont deployees symetriquement, les pieds sont constamment tournes en dehors, et dans la demarche, il y a quelque chose qui fait decouvrir une personne qui a cultive la danse. La danse sert beaucoup aux jeunes gens, parce que le mouvement est pour eux un besoin naturel, et l'exercice le meilleur moyen d'augmenter leur force. Toutes les personnes, quel que soit leur rang dans la societe, ont besoin de force et d'activite; je puis meme dire que tous sont ou seraient contents de posseder la beaute physique: c'est un desir naturel. Parmi ceux a qui le rang ou la fortune permet de frequenter la bonne compagnie, il y en a peu qui ne souhaitent pas d'unir a ces trois qualites l'elegance de port et de demarche; et rien ne peut rendre le corps plus gracieux et plus robuste que la danse et l'exercice de la pantomine. Chaque autre espece de gymnastique donne de la beaute ou da la force a diverses parties du corps, mais affaiblit les autres, et les rend, pour ainsi dire, difformes . L'escrime donne de la vigueur aux bras et aux jambes, mais rend le reste du corps un peu lourd. L'equitation augmente la grosseur des teins, mais affaiblit les cuisses. Enfin, tous les autres exercices laissent quelque chose de desagreable a ceux qui les pratiquent; ils ne peuvent, ni seuls, ni reunis, donner ce charmant aspect, et ces manieres agreables que la danse bien apprise ne peut manquer de procurer. C'est elle qui rend la tete, les bras, les mains, les jambes, les pieds, et enfin toutes les parties du corps symetriques, gracieuses et souples. La danse est tres-utile aux femmes, dont la constitution delicate doit etre fortifiee par beaucoup d'exercice; elle doit servir a les tirer de cette malheureuse inaction a laquelle une si grande partie est condamnee. L'art de la danse n'est pas seulement necessaire, il est indispensable a ceux qui aiment la societe. La maniere de se presenter et de recevoir avec grace, et la conduite polie et aisee, si convenable dans la societe, ne s'acquierent facilement que par ceux qui ont etudie cet art. J'en conclus donc que la danse, outre l'amusement qu'elle procure, sert a animer notre intelligence et notre corps, donne du secours dans quelques maladies, en guerit d'autres, ameliore l'harmonie de la societe, et devient une etude indispensable pour tous ceux qui ont le bonheur de posseder une honne education. CHAPITRE III. Principes de la danse . POSITIONS, SALUT, PAS, MAINTIEN. Plusieurs personnes ont decrit divers systemes sur l'enseignement de la danse de societe; mais leurs ouvrages renferment le defaut ordinaire a tout ce qui a paru sur la danse en general, c'est-a-dire un manque de principes clairs et positivement etablis. De tels ouvrages sont lus, mais ils n'apprennent presque rien. En etablissant des regles theoriques pour un art quelconque, et les moyens de porter cet art a la perfection, non seulement les regles doivent etre claires, mais les moyens doivent encore etre d'une execution facile. Nous ne pouvons jamais si bien montrer une chose aux autres que lorsque nous avons nous-memes vu et experimente ce dont nous parlons. Par ce motif, nous esperons que notre ouvrage ne meritera pas les critiques severes que l'on eleve souvent contre des ecrits non sanctionnes par la pratique de l'auteur. Nous ne pouvons trop insister sur la grace et l'elegance que les eleves doivent apporter dans leurs attitudes. Ces perfectionnements de notre art sont a la fois agreables a la vue et essentiels dans l'execution; mais en meme temps, ils sont bien difficiles a acquerir. Nous essaierons de guider nos lecteurs vers ce but. Tout danseur peut etre capable de figurer dans toute espece de quadrille; mais cet air aimable, ces manieres gracieuses et ce mouvement pittoresque qua l'on attend de ceux qui ont appris l' art de la danse, ne peuvent s'acquerir avectoute espece de professeurs; ils n'ont pour la plupart, ni la volonte, nile talent d'etudier leur art assez profondement pour produire sur lears eleves cet effet important. Quoique la danse de societe n'exige de ceux qui s'y livrent, ni une habilete extraordinaire, ni une application bien forte pour arriver a la perfection, cependant il faut certaines qualites physiques et quelque aptitude pour l'etudier avec succes. Sans ces qualites, on sera toujours embarrasse et ridicule en dansant, et il vaut mieux etre spectateur passif qu'acteur maladroit. On doit observer aussi qua si la connaissauce de la danse ajoute aux attraits d'une personne naturellement bien faite et agile, elle ne sert d'ailleurs qu'a randre plus visibles les defauts physiques des gens real faits, invinciblement lourds et impropres a tout mouvement gracieux. Nous avons deja explique l'utilite et les avantages que peuventretirer de la danse ceux memes qui ne pratiquent cet art attrayant que comme un simple amusement ou comme un complement de toute bonne education. Nous traiterons plus particulierement maintenant de la theorie et de l'execution de cette espece do danse qui est en usage dans la bonne compagnie et qu'etudie toute personne bien nee et de bon ton. Positions . Premiere position . Les jambes sont tres-etendues, los deux talons rapproches l'un contre l'autre, los plods completement en dehors et sur la meme ligne. Deuxieme position . Les jambes sont plus ecartees, mais seulement de la longueur du pied. Troisieme position . Los pieds sont a demi croises, le pied droit recouvrant le pied gauche jusqu'a la cheville. Quatrieme position . Les pieds sont places comme en troisieme position, avec cette seule difference qu'ils se croisent sans se toucher. Cinquieme position . Les pieds sont rapproches et se croisent entierement de la pointe au talon. Dans toutes ces positions les genoux doivent etre tendus. L'eleve devra plier los jarrets et s'elever sur les pointes dans chacune de ces positions. Salut . L'art de s'arreter avec grace, de saluer, de se presenter et de se tenir en compagnie, sont des choses essentielles, et qu'il faut rendre aussi naturelles que possible pour l'eleve. Pour saluer convenablement, il faut observer les regles suivantes: Quand vous marchez, arretez-vous de maniere que le poids du corps puisse rester sur la jambe qui est en avant; faites alors La Danse. 2 mouvoir la jambe restee en arriere, de maniere a prendre la quatrieme position en avant , la troisieme , puis la seconde . Elant a cette derniree position, portez le poids du corps sur la jambe qui vient de la former, et ramenez l'autre jambe a la premiere position, les talons places l'un contre l'autre et les pointes tournees en dehors; apres avoir plie convenablement les genoux, inclinez naturellement le corps. Que yes bras tombent aisement et que vetre tete s'incline sans affectation, car tout mouvement doit se faire d'un air aise. Apres avoir salue, redressez lentement le corps jusqu'a son aplomb perpendiculaire; reprenez votre maintien ordinaire; degagez la jambe qui a ete placee a la premiere position en arriere, en la changeant en quatrieme position en avant, et portez le poids du corps sur cette jambe. Soit que vous vouliez recommencer a saluer on a marcher, finissez toujours sur la jambe en avant. Ordinairement, et dans le monde ou l'on n'exige pus uns etiquette severe, le salut se fait generalement a la troisieme position, mats les pieds doivent toujours etre tournes en dehors. Les dames, pour executer gracieusement la reverence, s'inclinent apres que le pied a pris la premiere position, afin de s'arreter a la quatrieme position en arriere, quand les genoux se plient et que la tete s'incline avec le corps pour achever le salut. Apres ces etudes preliminaires et leurs exertices, qui sont les bases de la danse et qui mettent sur la voie de la perfection pour tout ce qui s'y rapporte, le maitre doit donner a son eleve la. connissance du pas, de la measure, des quadrilles, de la valse et de toutes les autres danses en usage dans la bonne compagnie. Que le maitre ne souffre pas que son eleve se livre a l'etude des danses avant de s'etre exerce quelque temps aux principes, car le bon ou le mauvais succes depend entierement des premieres lecons et de l'observation assidue ties regles fondamentales. Il faut avoir un soin continnel de ne pas oublier la ligne de demarcation qui existe entre la danse theatrale et la danse de societe. Il serait inconvenant, dans un bal, d'executer des pas savants et des entrechats d'elevation, parce qu'alors chacun do ces pas serait hors de place, que chaque circonstance en ferait ressortir la pretention deplacee, et consequemment que l'effet en serait completement ridicule. Pas . Aussitot que le professeur se sera assure des qualites naturelles, de l'aptitude et de l'habilete de son eleve, il lui apprendra les pas de la danse. Les principaux sont: les grands et petits battements, 1es battements sur le coude-pied, l'assemble , le jete, l'echappe , la glissade , le coupe-dessus et le coupe-dessous . Nous ne les decrirons pas ici. Le lecteur en trouvera la description, soit a chaque danse ou ces pas sont employes, soit au chapitre V specialement reserve a la danse theatrale choregraphique. L'elave doit les executer, d'abord etant tenu par la main, puis sans soutien, atin d'acquerir l'equilibre. Le professeur doit placer le corps, set les bras de son eleve dans une position droite, de maniere a rendre tontes ses attitudes ferines, souples et gracieuses. Maintien . La dense de societe exige des pas terre a terre et les attitudes les plus simples et les plus naturelies possibles. Les dames doivent danser avec une tenue aimable et gracieuse. Les cavaliers dotvent s'occuper constamment de leurs danseuses et tons doivent se mouvoir dans l'ensemble le plus parfait de pas et d'attitude. Il faut egalement preter la plus grande attention a la musique, et montrer qu'on en comprend toute l'expression et route l'harmonie. On doit tenir les bras legerement arques et les laisser tomber naturellement le long du corps. Quant a la position des jointures et aux inflexions du corps, il sere necessaire que l'eleve se soumette aux memes exercices que le danseur de theare, afin de donner a sa dense un effet agreeable. Nous observerons ici que, meme les amateurs, soit au moment de commencer une danse, soit a fin de leurs pas et enchainements, doivent toujours etre a la cinquieme et non a la troisieme position, comme la plupart des professeurs de dense de societe le pretendent. Plus les pieds sont croises, plus le depart est vif et la danse mesuree: c'est une consequence naturelie, et que l'on ne peut obtenir que des eleves que l'on n'a pas habitues a se croiser en troisieme position. En outre, cette methode aide les artistes a pirouetter, et leur donne les moyens d'acquerir cette agreable qualite qui consiste a tourner avec aisance; celui qui n'a pas les pieds tournes en dehors perd toute la beaute de ses pas. Quant aux mouvements du corps, ils sont presque les memes que ceux des danseurs de theatre, avec cette settle difference, qu'ils doivent leur donner moins d'ampleur, d'elevation, d'elan, eu un mot, les adapter a la danse d'un salon. Les jambes doivent s'elever au-dessus de terre, mais tres-peu, suivant la seconde position; les cavaliers, cependant, peuvent les elever un pea plus; le style particulier de leur danse etant plus nerveux et moins restreint admettra des pas plus eleves. Il n'est pas necessaire que les bras et le buste soient en mouvement; ils doivent plutot, au contraire, demeurer dans un repos gracieux. Maintenez la tete droite et le menton un peu eleve; inclinez la tete gracieusement, suivant le mouvement du corps et des bras. Que votre contenance exprime l'enjouement et la gaite, et qu'un sourire agreable erre souvent sur vos levres. Tenez les epaules effacees, la poitrine en avant, la ceinture rentree et les reins fermes et bien soutenus; que le haut du corps soit un pen penche en avant, car cela donne de la grace aux attitudes; que les epaules se meuvent avec elegance et naturel; que vos coudes s'arrondissent sans jamais se placer a angles droits; que vos doigts se groupent de maniere a repondre an contour des bras. Les bras setvent d'ornement au corps, et doivent en suivre les mouvements avec une elegance aisee. Qua le corps se penche pour ainsi dire, sur les hanches, et que ces dernieres se balancent elles-memes pour faciliter le mouvement des jambes. Tournez les genoux en dehors; que le pli en soit liant, et pliez-les bicu; vous aiderez ainsi tons les mouvements de la measure et des pas. Que les pieds soient constamment maintenus en dehors, et que le coude-pied acquiere en meme temps un certain degre de souplesse et de force. De cette facon, l'ou a plus de facilite pour courber les pieds en s'elevant sur les pointes et pour les changements de jambe. Les pointes doivent s'appuyer sur le parquet et aider a marquer les pas et la measure. Entin, que les pas s'enchainent bien l'un a l'autre et soient tous executes avec une elegance facile et une grace assuree. CHAPITRE IV. Danses de societe. 1. LE QUADRILLE FRANCAIS OU CONTREDANSE. Autrefois, lorsque la danse de societe etait un art, la grace, bien qu'indispensable, ne suffisait pas pour faire un danseur parfait. Chaque figure avait un pas different dont la difficulte etait reelle pour quelques personnes. Maintenant, une serie de glisses en avant et en arriere, voici les seuls pas que l'on emploie dans le quadrille, ce qui rend notre tache trop facile, puisque nous n'avons plus qu'a decrire les figures, le pas etant le meme pour toutes. Le quadrille se compose de cinq figures: le pantalon , l' ete , la poule , la pastourelle , et la finale . Pour former un quadrille, chaque cavalier va inviter une dame et retient un autre cavalier, qui a ete faire une invitation semblable, pour lui faire vis-a-vis. Ces invitations doivent etre faites avant que le signal soit donne pour se mettre en place. Les quadrilles ne peuvent etre formes a moins de deux ou de quatre couples, mais ils se composent d'autant de personnes que le salon ou la piece dans laquelle on danse peut en contenir. Si le salon est carre, les couples se forment sur les deux faces et dansent deux fois alternativement la figure. Si, au contraire, la piece est longue, les couples se placent en ligne sur la longueur; alors, les memes personnes dansent quatre fois la meme figure, s'il n'est pas convenu que l'orchestre jouera deux fois seulement la figure au lieu de quatre fois. Les dames se placent a droite des cavaliers. 1. Le Pantalon . 1 Chaine anglaise et balance . Deux cavaliers et deux dames, se faisant vis-a-vis, s'avancent, un couple vers l'autre, en se donnant la main, qu'ils se quittent au moment de traverser, et qu'ils se reprennent en se rejoignant; puis les deux couples reviennent chacun a sa place de la meme maniere. Alors chaque cavalier balance vis-a-vis de sa danseuse ou plutot execute avec elle un chasse-croise en glissant, le cavalier passant derriere sa dame. Ces deux figures durent seize mesures. 2 Chaine des dames . Les deux dames qui se font vis-a-vis changent de place et se donnent la main droite en passant; elles donnent ensuite la main gauche aux cavaliers qui restent a leurs places. Chaque cavalier, au moment ou sa danseuse commence la chaine, se porte a droite pour offrir sa main gauche a la dame qui vient remplacer sa danseuse, puis quitte la main de la dame et offre la main a sa danseuse qui revient prendre sa place. Cette figure dure huit mesures. 3 Promenade et demi-chaine anglaise . Chacun des danseurs des deux couples donne la main gauche a sa dame et traverse avec le vis-a-vis en obliquant a droite. Pour retourner a leur place primitive, les deux couples se quittent la main, et executent une demi-chaine anglaise en traversant, comme au commencement de la figure. Ces deux figures durent huit mesures. Les deux couples places dans l'autre sens du salon executent alors a leur tour les memes evolutions. 2. L'Ete . Avant-deux . Un cavalier et la dame qui lui fait vis-a-vis marchent deux fois en avant et en arriere pendant quatre mesures, ce qui constitue deux avant-deux. Traverse et chasse-croise . Le cavalier et la dame traversent ensuite et executent un seul chasse-croise en obliquant lgerement de droite a gauche. Cette figure dure quatre mesures. Traverse et balance . Ils traversent de nouveau et regagnent leurs places. La personne qui est restee a sa place, balance alors avec le danseur qui vient la rejoindre. Ces evolutions remplissent quatre mesures. Les deux personnes qui sont restees a leur place, dansent alors a leur tour; puis les deux autres couples places dans le sens transversal de la piece repetent la figure. Il est generalement en usage, dans les salons trop petits et ou les danseurs sont trop nombreux, d'executer cette figure deux a deux, comme nous l'avons decrite, afin de menager la place; mais on peut la danser aussi les deux couples a la fois. Les avant-deux deviennent alors des avant-quatre; les couples repetent ensemble deux fois la figure, au lieu qu'elle soit dansee une fois isolement par chaque personne. 3. La Poule . Balance a quatre . Un cavalier et la dame de son vis-a-vis se dirigent l'un vets l'autre, et traversent. Le cavalier faisant face a la dame de son vis-a-vis, lui offre la main gauche et la main droite a sa danseuse, qui vient le rejoindre, tandis que le vis-a-vis vient rejoindre sa danseuse, laquelle il offre la main droite. De cette facon les deux couples se tronvent places en ligne, les cavaliers d'un cote, les dames de l'autre, se faisant face. Dans cette position, les deux couples balancent a driote et a gauche puis traversent en se quittant la main, chacun occupant la place deson vis-a-vis. Cette figure dare seize mesures. Avant-deux, avant-quatre et demi-chaine anglaise . Les deux danseurs qui out commence la figure font un avant-deux en avant et en ariere; le cavalier vient offfir la main a sa dame et fait avec elle an avant-quatre, puis les deux couples se quittent la main, traversent et balancent en regagnant lear place. Cette figure dure seize mesures. C'est alors au tour des danseurs qui n'ont pas engage le balance a repeter la figure, puis vienvent les deux autres couples places dans le sens eppose. 4. La Pastourelle . Avant-deux . Un cavalier et sa dame, se donnant la main, vont deux fois en avant et en arriere; la seconde fois, le cavalier conduit sa danseuse a la gauche de son vis-a-vis et revient seul a reculons a sa place. Ces avant-deux durent huit mesures. Deux avant-trois et un demi-rond . Le vis-a-vis, qui se trouve place entre les deux dames, donne la main a chacune d'elles, et tous trois vont deux fois en avant et en arriere, pendant huit mesures; la seconde fois, les dames pivotent en faisant un tour de main et viennent donner la main an cavalier qui a engage la figure. Le cavalier qui etait reste seul, lee conduit a son tour deux fois en avant et en arriere, puis le vis-a-vis donne la main aux dames (huit mesures). Les quatre danseurs reunis, forment alors un demi-rond, pendant quatre mesures. Lee couples se separent ensuite, chaque cavalier tenant sa danseuse par la main, et retournent a leur place, en ss quittant la main pour traverser et en balandant lorsque chacun a regagne sa place. Cette demi-chaine anglaise et ce balance s'executent en quaire mesures. Le vis-a-vis repete ensuite la meme figure, puis les deux couples, qui sour restes en place, l'executent chacun a son tour. Il etait d'usage autrefois que le cavalier reste seul executat un avant-deux solo; il deployait en cette occasion tout son savoir faire. Ce cavalier seul , ainsi que ton nommait ce pas, ne se danse plus guere que dans la grande intimite. 5. La Finale ou Galop . Cette figure est la plus gale, la plus vive du quadrille. A l'exception de quelques bals a etiquette oh ou la marche , on la danse generalement en galopant, ce qui lui a valu le nom de galop . Le pas du galop se compose d'un glisse et d'un chasse . L'orchestre execute d'abord seal lea seize premieres mesures. Vers la fin, chaque cavalier passe le bras droit autour de la taille de sa dansense sense et lui soutient la main droite dans sa main gauche; le bras gauche de la danseuse est appuye sur l'epaule dn cavalier. Dans les bals a ceremonie, le cavalier ne tient pas sa dame par la taille et la conduit seulement en la tenant par la main. Les figures se font dans l'ordre suivant: Promenade . Chaque couple, obliquant a droite, passe a la place de son vis-a-vis et revient a sa place de la meme facon (huit mesures). Deux avant-quatre . En avant et en arriere; la seconde fois, chaque cavalier change de dame et de place (huit mesures). Chaine des dames (hair mesures). A vant-quatre et demi-promenade . Les cavaliers executent un seul avant-quatre avec la dame de leur vis-a-vis, puis ils reprennent la leur avec laqulle ils reviennent a leur place sans traverser (huiy mesures). Les deux premiers couples exeutent deux fois ce galop et cedent alors la place a ceux qui sont places transversalement. Lorsque la cinquieme figure eat terminee, chaque cavalier offre le brask a sa dame, la reconduit a sa place et en prend conge en la saluant sans affectation. 2. Le Galop . Il est quelquefois d'usage, mais seulement dans l'intimite et lorsque le nombre des danseurs est un pea diminue, de terminer le quadrille par un galop general , auquel tous les couples qui ont danse le quadrille prennent part, Lepas du galop est le meme que celui que nous avons indique a la cinquieme figure du quadrille; il se compose d'un glisse et d'un chasse . Les couples dansent ce galop dans le meme sens autour du salon, ou bien en pivotant sur eux-memes si la place est restreinte. Depuis quelque temps, on a introduit dans les salons un nouveau galop, qui tient de la polka pour le pas et du cotillon pour l'execution; il est d'un fort joli effet. Les danseurs etant places en rond autour du salon, la dame tonjours a la droite de son cavalier, l'orchestre joue une polka, et los danseurs polkent en rond en se tenant par la main. Lorsqu'ils sont revenus a la place qu'ils occupaient, an des cavaliers qui conduit ce galop frappe dans sos mains; alors chaque cavalier polke un tour avec sa dansense jusqu' a ce que los couples soient revenus a leur place. A ce moment, chaque cavalier remet sa dansense a sa gauche , puis, cavaliers et dames, se remettent a polker en rond en se tenant par la main. Sur un nouveau signal, chaque cavalier se met a polker avec la danseuse qui se trouve a sa droite . De cette facon, les dames font le tour du salon, les cavaliers La Danse . 3 restent a leur place. Il est essentiel que l'ordre des couples ne soit pas interverti. Lorsque chaque dame a retrouve son cavalier, l'orchestre se remet a jouer un galop, les danseurs executent un ou plusieurs tours en galopant et la figure est terminee. 3. Le Quadrille croise . Ce quadrille ne se danse qu'a huit personnes placees en croix, ou encore en diagonale, si le salon est petit. Les figures sont les memes que celles que nous avons decrites pour le quadrille francais ordinaire. Toute la difference vient de ce que les couples places dans l'un et l'autre sens du salon dansent a la fois, mais l'un apres l'autre. Les mouvements des danseurs doivent done etre plus prompts et les couples doivent traverser rapidemerit, se porter pres de leur vis-a-vis et y rester jusqu' a ce que les couples transversaux aient fait le meme mouvement, puis revenir promptemerit a leur place de facon a ne pas gener le retour du couple transversal. La musique et le mouvement de la mesure etant les memes que pour le quadrille ordinaire, les danseurs doivent faire leurs evolutions en une fois moins de temps. Aussi l'execution de ce quadrille est-elle tres-vive, et les danseurs des quatre couples doivent-ils bien s'entendre pour ne pas embrouiller les figures. Nous ne parlerons pas des 1 re , 2 e , 4 e , et 5 e figures qui ne presentent aucune difficulte mais nons decrirons la troisieme figure ou le balance est remplace par un moulinet a l'anglaise , que nous retrouverons plus loin dans le quadrille des Lanciers. Troisieme figure. La Poule . Traverse . Un cavalier traverse avec la dame de son vis-a-vis; pendant ce temps, le cavalier place dans le sens transversal en fait autant. Les quaire couples se trouvent reunis au milieu du salon, les dames all centre (huit mesures). Moulinet . Chaque dame donne la main droite a la danseuse qui lui fait vis-a-vis (lears mains sent done superposees et placees en croix), puis elles ferment un moulinet pendant huit mesures. Avant-deux, avant-quatre, demi-chaine anglaise et balance . A la fin de ces huit mesures, les dames se separent, donnent la main gauche a leur cavalier, qui est reste en dehors du cercle forme par le moulinet, puis chaque couple se rend a la place oceupee par son vis-a-vis. On execute alors pendant seize mesures un avant-deax, un avant-quatre, une demi-chaine anglaise et un balance, comme dans le quadrille ordinaire. Ensuite l'autre cavalier engage la meme figure, puis vient le tour des deux autres couples. De cette facon, le moulinet se fait quatre fois. Remarquons aussi que dans la quatrieme figure , on remplace les ronds partiels par tin grand rend general antour du salon. A la fin des huit mesures qu'il occupe, chaque couple doit se retrouver a sa place. 4. Quadrille des Lanciers . Ce quadrille est une importation anglaise qui remonte a une quinzaine d'annees. Il a ete accuelli avec faveur dans les salons de l'Europe entiere, et, depuis, il s'est naturalise chez nous ou il jouit d'une grande vogue. On ne le danse qu'avec 4 couples, places en croix ou en diagonale si le salon est petit. Comme le quadrille francais, il se compose de cinq figures qui sont: 1 les tiroirs; 2 les lignes; 3 le moulinet; 4 les visites; 5 les lanciers. Cette cinquieme figure a donne son nom an quadrille; c'est en effet la plus originale. La musique des quatre premieres figures se joue quatre fois et celle de la cinquieme figure huit fois. Cheque figure se compose de 24 mesures, sauf la troisieme qui n'en contient que 16. 1. Les Tiroirs . En avant-deux et tour de mains . Un cavalier (que nous nommerons premier cavalier pour la clarte de notre description) et la dame qui lui fait vis-a-vis vont deux fois en avant et en arriere; la secoride lois, le cavalier offre la main droite a la dame, qui lui donne la main gauche, et ils font un tour sur place en se tenant ainsi (c'est ce que l'on nomme le tour de mains ), puis ils reviennent chacun a sa place (8 mesures). Tiroirs . Les deux coupless, cheque cavalier donnant la main droite a sa dame, s'avancent l'un vers l'autre comme pour la chaine anglaise. Le premier cavalier et sa dame passent la premiere fois au milieu, l'autre couple se separant pour leur faire place; la seconde fois, le second couple passe au milieu pendant que le premier se separe (8 mesures). Balance et tour de mains . Les cavaliers des quatre couples qui composent le quadrille balancent avec les dames qui sont a leur gauche, font un tour de mains avec elles et reviennent a leur place (8 mesures). Les trois autres couples repetent la meme figure dans l'ordre suivant: 1 le couple qui fait vis-a-vis avec le premier cavalier; 2 le couple qui est a sa droite; 3 le couple qui est a sa gauche. Cet ordre est observe dans tout le quadrille; nous le donnons done ici une fois pour toutes. 2. Les Lignes . En avant-deux . Le premier cavalier va deux fois en avant et en arriere avec sa dame; la seconde fois, il place sa dame devant lui, tournant le dos au cavalier qui lui fait vis-a-vis et s'eloigne un peu en arriere (8 mesures). Chasse et tour de mains . Alors ce cavalier et sa dame executent deux chasses, l'un a droite, l'autre a gauche, puis tous deux font un tour de mains et la dame vase mettre a cote du cavalier place a sa droite, tandis que le cavalier so met cote de la dame placee a sa gauche (8 mesures). Pendant ce temps, le couple de vis-a-vis execute le meme mouvement, la dame a droite et le cavalier a gauche. Les quatre danseurs se trouvent ainsi disposes en deux lignes dans le sens oppose a celui dans lequel la figure s'est engagee. Lignes . Les huit danseurs vent deux fois en avant et en arriere. La seconde fois, chaque cavalier prend de la main droite la main droite de sa dame et revient avec elle a sa place (8 mesures). Les trois autres couples repetent la meme figure. 3. Les Moulinets . Avant-deux et salut . Le premier cavalier et la dame de son vis-a-vis vent deux fois en avant et en arriere; la seconde fois, sur un point d'orgue de l'orchestre, le cavalier fait un salut et la dame une reverence prolonges, pais chacun revient a sa place (8 mesures). Demi-moulinet, tour de mains, demi-moulinet, tour de mains . Les quatre dames qui composent le quadrille se reunissent a la fois au centre et les deux vis-a-vis se donnent la main droite (lesmains des dames se trouvent ainsi placees en croix et superposees); les cavaliers restent a leur place. Dans cette position, les dames font un demi-moulinet, se separent pour faire tin tour de mains avec le cavalier qui leur fait vis-a-vis, se rejoignent pour faire un autre demi-moulinet et se quittent encore pour faire un autre tour de mains aver leur cavalier et revenir ainsi a leur place (8 mesures). Pour faire ces deux tours de mains, los dames donnent la main gauche aux cavaliers. Les trois antres couples repetent la meme figure. 4. Les Visites . Visites . Le premier cavalier etsa dame vent se placer devant le couple de droite (ce que l'on nomme faire visite ); les deux cavaliers saluent et les dames font la reverence (4 mesures). Sans s'arreter, le premier couple va faire visite a celui qui est place a sa gauche et tous deux font les memes saluts et reverences (4 mesures). Pendant ce temps, le couple qui fait vis-a-vis au premier cavalier execute les memes visites avec ceux places a sa droite et a sa gauche. Chasse-croise . Le premier couple fait avec le couple place a sa gauche un chasse-croise, l'un a droite, l'autre a gauche, pendant que le couple de vis-a-vis execute le meme mouvement avec le couple place a sa gauche (8 measures). Chaine anglaise . Le premier couple fait ensuite une chaine anglaise (comme dans le quadrille francais) avec le couple qui lui fait vis-a-vis (8 mesures). Remarquons que, dans cette figure, les deux couples places a droite et a gauche de celui qui engage la figure, ne quittent pas leur place; ils recoivent les visites, chassent avec les deux. Couples qui se sent places derant eux et ne prennent pas part a la chaino anglaise. Il en est de meme pour le premier couple et son vis-a-vis 3 la troisieme et a la quatrieme repetition de la figure. 5. Les Lanciers . Grande chaine en rond . Les cavaliers se trouvent vis-a-vis de leurs dames et leur donnent la main gauche. Au signal donne par l'orchestre, dames et cavaliers partent a la fois en avant, donnant a la personne qui vient au-devant d'eux la main qui leur reste libre, puis l'autre main, puis l'autre encore (4 mesures). Les dames et les cavaliers doivent alors rencontrer leur vis-a-vis, auxquels ils font, l'une une reverence, l'autre un salut. Puis, les danseurs recommencent la meme chaine avec les memes changements de main jusqu'a ce que chaque dame ait rencontre son cavalier auquel elle fait une nouvelle reverence, pendant qu'il lui rend un salut (4 mesures). Remarquons que, par ces changements de main successifs, les cavaliers et les dames passent alternativement a droite et a gauche les uns des autres. Les danseurs, dans toute cette figure, sauf les chasses-croises qui se font en chassant, marquent trois temps, comme dans le pas de Polka, sans cependant executer le pas de cette danse. Chasses-croises . Le premier cavalier, conduisant sa dame par la main gauche, fait avec elle une promenade en obliquant un peu a droite et revient a sa place ou tous deux tournent le dos a leur vis-a-vis. Le couple de droite en fait autant et se place derriere le premier couple, puis le couple de gauche, qui se place a la suite; le couple de vis-a-vis demeure immobile etse trouve naturellement place a la fin. Cette preparation dure 4 mesures. Dans cette position, les huit danseurs executent, pendant 4 autres mesures, un chasse-croise a droite et a gauche, le premier cavalier passant derriere sa dame. Lanciers . Par suite du chasse-croise precedent, les cavaliers se trouvent places en file d'un cute et les dames de l'autre dans la meme position, le premier cavalier et la premiere dame en tete. Chacun fait alors, pendant 8 mesures, une promenade en dehors, les cavaliers a gauche, les dames a droite; puis, revenus en position, les cavaliers et les dames se font face. En avant-huit, tour de mains . Les cavaliers se tenant par la main, d'un cote, les dames se tenant aussi par la main, de l'autre, vont deux fois en avant-huit. Puis, tous les danseurs se separent, les cavaliers font un tour de mains avec leur dame, qui leur fait vis-a-vis, et les quatre couples reprennent leur plae (8 mesures). Les trois autres couples repetent les memes mouvements, chacun dans l'ordre que nous avons indique apres la premiere figure. On termine quelquefois ce quadrille par quelques tours de polka. 5. La Valse . La valse, qui nous vient de Suisse et qui est la danse nationale de l'Allemagne, s'execute a trois ou a deux temps. La valse allemande , la plus repandue et la glus generalement admise dans la bonne societe, se danse a trois temps; la valse russe ou sauteuse , qui derive de l'allemande, se danse a deux temps, quoique la musique se joue toujours a trois temps. Valse a trois temps . La valse a trois temps se compose de deux pas; ils completent le demi-tour de valse, qui se fait en une mesure, et, repetes dans la seconde mesure, ils forment un tour entier de valse. Ces pas different l'un de l'autre, quoiqu'ils soient pour ainsi dire entrelaces, de maniere a empecher les pieds de l'un des valseurs de heurter les pieds de l'autre. Ainsi, pendant qu'un cavalier fait un pas, la dame en fait un autre et les tours de valse s'executent ainsi de suite sans interruption. Pour executer le pas de la valse a trois temps, le cavalier avance le pied gauche devant la dame (1 er temps), ramene le pied droit derriere le pied gauche (2 e temps), puis, se soulevant legerement sur les pointes, passe le pied gauche devant le pied droit en troisieme position (3 e temps). La dame, de son cote, avance le pied droit, ramene le pied gauche et le passe devant le pied droit en se soulevant un peu sur les pointes. Les deux danseurs ont ainsi fait un demi-tour de valse en trois temps ou une mesure. En repetant ce mouvement pendant l'autre mesure, le couple se trouve avoir execute un tour entier de valse. On peut voir par ces details que cette valse ne se compose que de deux pas principaux, le troisieme servant de preparation a la mesure suivante. Ainsi, lorsque l'un des deux valseurs avance le pied droit pour commencer le premier pas decrit ci-dessus, l'autre valseur porte en meme temps le pied gauche en arriere pour commencer l'autre pas, laissant au premier la facilite d'avancer le pied; tous les deux executent alors un demi-tour, puis l'on repete le pas que l'autre vient d'executer dans le second demi-tour pour achever le tour de valse. Pour commencer la valse, le cavalier doit passer son bras droit autour de la taille de la dame et lui soutenir la main droite dans la main gauche a la hauteur de la ceinture, le bras gauche de la dame etant appuye sur l'epaule de son cavalier, Lorsque les deux danseurs sont en place, la dame a la droite de son cavalier celui-ci part du pied gauche en tournant devant sa danseuse; la dame execute le mouvement inverse et la valse est engagee. Quelques danseurs ont l'habitude de faire preceder le depart d'une preparation qui consiste a balancer legerement sur le 3 e et le 1 er temps de la mesure. Pour bien valser, tous les temps doivent etre exactement marques. Les deux danseurs doivent faire attention a ce que chaque demi-tour soit nettement et completement execute de maniere qu'eu le terminant, ils se trouvent toujours du cote oppose a celui ou ils etaient places en partant. S'il en etait autrement, les valseurs se jetteraient infailliblement les uns sur les autres, ou sur ceux qui sont au milieu de la salle, ce qui arrive souvent lorsqu'il se trouve de mauvais danseurs dans la societe. Valse a deux temps . Cette valse, ainsi nommee parce que le pas se compose simplement d'un glisse et d'un chasse (2 mouvements), se danse sur une mesure a trois temps, quoique d'un mouvement plus precipite que pour la valse a trois temps. Ce serait une erreur de croire que, chaque mesure de la valse contenant trois temps, les danseurs doivent executer trois tours en deux mesures. Le glisse se fait plus lentement que le chasse, le premier durant deux temps, tandis que le second ne dure qu'un temps. Cette valse est donc reellement a trois temps et devrait plutot s'appeler a deux mouvements , mais la locution vicieuse a prevalu. D'apres ce qui precede, il nous sera facile d'expliquer le pas de cette valse. Le cavalier, place un peu plus sur le cote de sa dame que pour la valse a trois temps, et legerement courbe sur son epaule, glisse le pied gauche en allongeant un peu la jambe, pour que, le pied droit venant a chasser le pied gauche et a prendre sa place, le danseur se trouve avoir execute un demitour de valse. La dame, de son cote, glisse du pied droit et chasse du pied gauche. Ce meme pas etant execute a la mesure suivante, les deux danseurs se trouvent avoir execute un tour entier de valse. Les valses a deux ou a trois temps se dansent ordinairement en avant, le cavalier partant du pied gauche et la dame du pied droit. Mais les danseurs qui ne redoutent pas la difficulte peuvent les valser a droite ou a gauche, en avant ou en arriere, et meme sur place, si un obstacle se presente ou s'ils preferent ne pas toujours tourner dans le meme sens. 6. La Polka . La polka nous vient de la Hongrie, qui ellememe la tenait de la Pologne, ainsi que son nom ( polska ) l'indique. Elle se danse a 2 temps; mais, dans l'enseignement, on decompose le pas en 4 mouvements, qui representent les 4 croches de la musique. On la valse ordinairement en avant, de gauche a droite pour le cavalier et de droite a gauche pour la dame; mais les bons polkeurs la dansent parfois en sens inverse pour ne pas toujours tourner dans le meme sens, ou bien meme sur place et en arriere, lorsqu'un obstacle se presente dans un salon trop exigu. Le pas, qui, disions-nous, se decompose en 4 mouvements, se fait ainsi pour le cavalier: Levez le pied gauche derriere la cheville du pied droit, sautez legerement sur le pied droit et glissez le pied gauche en avant (1 er mouvement), remenez le pied droit derriere le pied gauche (2 e mouvement), glissez le pied gauche en avant (3 e mouvement), puis ramenez le pied droit derriere la cheville du pied gauche (4 e mouvement). La Danse . 4 Le cavalier vient d'executer ainsi un demi-tour avec les trois premiers mouvements de la polka; le quatrieme mouvement ne sert qu'a preparer le depart pour la seconde mesure. Cette fois, le cavalier, dont le pied droit se trouve place derriere la cheville du pied gauche, sautera legerement sur le pied gauche en glissant le pied droit en avant (1 er mouvement), il ramenera le pied gauche derriere le pied droit (2 e mouvement), il glissera le pied droit en avant (3 e mouvement), puis il ramenera le pied gauche derriere la cheville du pied droit (4 e mouvement). Il se trouvera avoir execute de cette facon un tour entier de polka. La dame execute le meme pas que le cavalier, mais en sens inverse, c'est-a-dire que pendant qu'il part du pied gauche, elle part du pied droit et vice versa . Elle suit la direction que lui donne son cavalier a droite, a gauche, en avant on en arriere. Comme dans la valse et dans toutes les danses qui s'executent en tournant, le cavalier passe on bras autour de la taille de sa danseuse, dont le bras gauche repose sur l'epaule du cavalier, et lui soutient la main droite dans sa main gauche, a hauteur de la ceinture. La polka, qui est extremement repandue aujourd'hui en France, na doit pas se danser par soubresauts; les petits sauts du 1 er mouvement se remplacent meme dans la bonne societe par de petits glisses. Enfin, il est de bon ton de ne pas exagerer la longueur des pas et de les danser meme un peu terre-a-terre . 7. Schottisch . La schottisch, ainsi que son nom l'indique, est originaire d'Ecosse. Elle a ete introduite en France a la suite de la polka, avec laquelle elle presente plusieurs points de ressemblance, tant pour la mesure que pour les pas. La mesure est a deux temps comme celle de la polka, mais d'un mouvement un peu plus lent; les temps demandent a etre fortement accentues, principalement dans les 3 e , 4 e , 7 e et 8 e mesures, qui marquent huit temps de sauteuse . On peut decomposer la schottisch en deux parties. La premiere, qui se compose des deux premieres mesures, s'execute avec deux mesures de polka; la seconde, qui se compose des deux mesures suivantes, s'execute en sautant deux fois alternativement sur chaque pied, ce que l'on nomme pas de sauteuse . Le cavalier part du pied gauche et la dame da pied droit. La schottisch se valse comme la polka le cavalier et sa dame etant places de meme que pour cette danse. C'est principalement pendant les mesures de sauteuse que les deux danseurs tournent sur eux-memes avec le plus de vivacite. Ils doivent faire attention, et surtout les cavaliers, a ne pas blesser on gener les danseurs voisins en executant les quatre pas de sauteuse, ainsi que le font quelquefois certaines personnes maladroites on inhabiles. Pour echapper a ce defaut, il suffit de faire ces pas un peu terre a terre et de ne pas trop lever un pied derriere l'autre, ce qui est toujours un signe de mauvais ton. 8. La Polka-Mazurke . La mazurka nous vient de la Pologne. Cette charmante danse, dont les figures sont tres-gracieuses, mais tres-compliquees et variees a l'infini, appartient principalement au domaine de la dause theatrale. Elle ne pouvait se danser en cet etat dans les salons, ou la danse facile de pas et de mesure est la seule pratiquee; il a donc fallu la simplifier et la rapetisser selon les besoins du monde. C'est ainsi que s'est produite la polkamazurke ou mazurke que nous connaissons. La polka-mazurke se danse sur une mesure a 3 temps, d'un mouvement modere. Le pas s'execute en six temps pendant l'espace de deux mesures. Un cavalier, tenant sa dame par la taille comme pour la polka, glisse le pied gauche en avant (1 er temps), chasse avec le pied droit en meme temps qu'il leve le pied gauche (2 e temps), puis ramene le pied gauche a la hauteur de la cheville du pied droit (3 e temp). Pour la seconde mesure, il glisse de gauche a droite avec le pied gauche, qui se trouve leve pres du pied droit (4 e temps), chasse du pied droit en levant le pied gauche (5 e temps), puis ramene le pied gauche a plat pres da pied droit, en sautant legerement, tandis que le pied droit se leve et vient se placer pres du pied gauche a la hauteur de la cheville (6 e temps). La dame execute les memes mouvements en sens inverse, e'est-a-dire qu'elle part da pied droit quand son cavalier part du pied gauche. La polka-mazurke se valse ordinairement en avant, on se danse en ligne droite, lorsque l'espace est momentanement trop restreint ou qu'il survient quelque obstacle. Pour valser la polka-mazurke, les danseurs executent un tour entier en pivotant de gauche a droite pendant les 4 e et 5 e temps de la seconde mesure, de facon qu'ils se retrouvent au 6 e temps exactement dans la meme position ou ils etaient places avant leur depart. Ils parcoureut ainsi le salon en rond sans se jeter sur aucun couple de la societe, ce qui ne manquerait pas d'arriver s'ils no prenaient pas soin d'executer completement un tour. Pour danser la polka-mazurke en ligne droite, ce qui equivaut a un mouvement sur place, les danseurs executent seulement un demi-tour de gauche a droite pendant les 4 e et 5 e temps de la seconde mesure; ils se trouvent ainsi au 6 e temps dans une position entierement opposee a celle qu'ils occupaient en partant. Quelques danseurs valsent la polka-mazurke pendant les deux mesures, c'est-a-dire qu'ils n'executent a chaque mesure que les 4 e , 5 e et 6 e temps, au moyen desquels ils decrivent un demi-tour par mesure. 9. Redowa . La redowa est d'origine parisienne. C'est une imitation ou plutot un melange de la valse a deux temps et de la polka-mazurke. On la joue a trois temps, comme ces deux danses, mais sur un mouvement plus lent qua celui de la polka-mazurke. C'est a tort que certaines personnes l'executent sur un mouvement plus vif et qui se raproche de celui de la valse; elles detruisent ainsi l'effet gracieux du glisse , qui est le pas caracteristique de la redowa. Le cavalier, ayant son bras droit passe autour de la taille de sa dame et sontenant sa main droite de la main gauche, glisse le pied gauche en avant et en le portant de gauche a droite (1 er temps); il rapporte le pied droit, sur lequel il saute legerement et leve le pied gauche (2 e temps); puis il rapporte le pied gauche, et, sautant un pea sur ce pied, il leve le pied droit darriera le pied gaucha (3 e temps). La mesure suivante s'execute en glissant le pied droit chassant du pied gauche, et rapportant le pied droit, en tenant le pied gauche leve, pret a commencer la troisieme mesure. La dame, au contraire, execute la premiere mesure en glissant du pied droit et la seconde en glisant du pied gauche. Il est tres-important de bien plier las jarrets en glissant ce premier pas. La redowa se valse comme les danses precedentes. On peut, pour faire diversion ou selon la place dont on dispose, varier le pas, tantot avec la valse a deux temps, tantot avec la polka-mazurke. Cette derniere danse s'harmonise mieux avec le mouvement de la musique. Au moment ou nous ecrivous, on ne dense plus guere la redowa. Il est bien probable que, dans quelques annees, elle aura subi le sort de la Varsoviana et de la Sicilienne (sorte de tarentelle) que l'on avait essaye d'acclimater dans les salons parisiens; aussi ne nous occuperons-nous pas de ces deux danses. Les dernieres nouveautes offertes aux danseurs parisiens ont ete le Quadrille du Prince Imperial et la Duchesse ; elles n'ont fait que passer. Il est fort guestion en ce moment d'un nouveau quadrille inedit, patrone par le celebre Cellarius et plusieurs professeurs en renom : les Varietes . Ses figures n'empruntent rien, dit-on, a ce qui a ete fait jusqu'a ce jour, ni aux danses etrangeres; c'est veritablement un quadrille national et essentiellement parisien. On le destine a remplacer l'ancien Quadrille francais et le Lancier anglais; mais ces deux danses ont pousse de profondes racines dans nos habitudes, et il est a presumer qu'elles resisteront a cette concurrence. Vivra-t-il autant qu'elles? c'est une question dont nous ne saurions prejuger. Ce qui nous ferait croire le contraire, c'est le peu de gout que l'on a aujourd'hui pour la danse. Il faudrait apprendre, et il est si facile de vivre sur ce qu'on sait, sans recourir a l'etude. Souhaitons cependant bonne chance aux Varietes ; elles viendront grossir le repertoire bien restreint des danses de societe. 10. Le Cotillon . Le cotillon est la danse finale d'un bal. On le danse, soit en valsant, soit en polkant; mais la polka est generalement adoptee, parce que bien des personnes ne valsent pas on le font d'une maniere incorrecte, tandis que, qui ne polke pas aujourd'hui? Pour danser un cotillon, tout ce qui reste de danseurs dans un salon se forme en couples. Le nombre n'en est pas limite. A cette heure avancee lorsqu'une grande partie des danseurs s'est deja retiree et que ceux qui restent ont presque lie connaissance, en oublie la fatigue d'une nuit passee a danser, on retrouve ses forces, enfin on s'amuse! Un des cavaliers conduit le cotillon et fait executer les figures; de lui dependent l'entrain et l'animation du cotillon. Heureuse la reunion qui rencontre un conducteur intelligent, qui choisit les figures avec gout et n'impose pas aux dames des tours de force souvent inexecutables! Il commande a l'orchestre, qui, d'apres ses ordres, varie les danse, s'arrete et reprend. Il doit savoir terminer a temps le cotillon, si 'lheure est avancee, l'orchestre fatigue, et s'il voit enfin des traces de lassitude non equivoques. Alors, il annonce la figure du salut , qui est la dernere, et qui clot la soiree. Nous n'avons pas la pretention d'indiquer ici toutes les figures qui se dansent; elles varient a l'intim, et souvent elles sont l'oeuvre de l'imagination du cavalier conducteur. Apres chaque figure, il doit frapper legerement daus ses mains pour faire arreter les danseurs et annoncer le commencement d'une autre figure. Chaque cavalier ayant engage une dame, se place avec elle au milieu da salon, soit en rond, soit en l'gne dronite, position qui depend souvent de la place de laquelle on dispose et que l'on a pris soin de grandir autant que possible. On commence le cotillon par une promenade, le conducteur en tete, valsant ou polkant avec sa dame et suivi de tous les couples qui repetent leurs mouvements. Apres quelques tours de promenade, le cavalier conducteur frappe dans ses mains, les couples s'arretent, il ordonne et tous les danseurs executent. Nous allons indiquer r les figures les plus usitees, mais nous le repetons, leur variete depend de l'imagination du cavalier conducteur. Les Dos-a-dos . Apres la promenade, le couple conducteur se separe, le cavalier place quatre ou cinq cavaliers en ligne au milieu du salon, la dame amene autant de dames qu'elle place derriere ces cavaliers, mais leur tournant le dos. Au signal donne, tous se retournent a la fois et les dames font la promenade avec les cavaliers qui se trouvent devant elles. Les Impairs . Ce cavalier conducteur choisit quatre ou cinq dames qu'il place en ligne au mileu du salon, puis il amene cinq ou six cavaliers et les place en ligne derriere les dames, mais leur tournant le dos. Il doit toujours y avoir un cavalier de plus qu'il n'y a de dames. Au signal du cavalier conducteur, dames et cavaliers se retournent et dansent ensemble. Le cavalier solitaire revient se placer sur un cote du salon, pendant que les couples font la promenade. Les Tours de mains . Apres la promenade, les couples se divisent en nombre egal, chacun du cote du salon, puis ils se rapprochent, et les cavaliers placent leurs dames devant eux, sur deux lignes, les dames se tournant le dos. Alors chaque cavalier fait un tour de mains avec la dame placee a la gauche de sa danseuse et ainsi de suite, en tournant autour des deux lignes, jusqu'a ce que les cavaliers aient retrouve leurs dames. Puis tous les couples font une promenade. Les Ronds. Le cavalier conducteur et sa dame vont choisir un couple avec lequel ils se placent au milieu du salon, et tournent de gauche a droite en formant un rond. Les autres danseurs se reunissent et forment un grand rond autour de ce petit, mais en tournant en sens inverse, c'est-a-dire de droite a gauche. Apres quatre tours, le cavalier conducteur donne le signal auquel les couples se reunissent et font une promenade. Le Coussin . Le cavalier conducteur fait asseoir une dame sur une chaise placee au milieu du salon et lui remet na coussin, que la dame tient devant elle par un coin. Chaque cavalier va s'agenouiller sur le conssin. Si la dame ne veut pas danser avec le cavalier qui se presente, elle retire le coussin et le cavalier s'agenouille a terre; sinon, elle laisse le genon du cavalier poser sur le coussin, et fait avec lui un tour de promenade. On peut repeter cette figure et les suivantes autant de fois qu'il y a de dames dans le cotillon. Le Miroir . Le cavalier conducteur fait asseoir une dame placee au milieu du salon et lui remet entre les miras un petit miroir. Chaque cavalier vient a son tour se presenter derriere la dame qui voit la figure du cavalier se refleter. Si elle ne veut pas danser avec lui, elle esuie le miroir avec son mouchoir; le cavalier se retire et est remplace par un autre, et ainsi de suite, jusqu'a ce que la dame, se levant et posant son miroir sur sa chaise, presente la main au cavalier place derriere elle et fait la promenade avec lui. L'Eventail . On place trois chaises au milieu du salon, deux du meme cote et celle du milieu en sens inverse. Le cavalier conducteur chaisit une dame qui vient se placer sur la chaise du milieu, puis il emene deux cavaliers qui s'asseoient sur les deux autres chaises, en tournant le dos a la dame. Celle-ci remet son eventail au cavalier avec lequel elle ne veut pas danser, et danse avec l'autre, tandis que le cavalier dedaigne les suit en les eventant. On remplace quelquefois l'eventail par un mouchoir que le cavalier dedaigne agite sur la tete des danseurs, ou encore par un verre de punch on de Bordeaux, qu'il boit tandis que les danseurs font la promenade. Le Rond interrompu . Apres la promenade, le cavalier conducteur laisse se dame au milieu du salon, et lui remet un chapeau ou un bonnet de femme. Tous les cavaliers se reunissent et se donnent la main en presentant le dos a la dame; ils executent alors un grand rond autour d'elle en tournant assez vivement. Apres un tour ou deux, la dame place sur la tete du cavalier qu'elle choisit le chapeau ou le bonnet qu'elle tient a la main, et danse avec lui au centre, tandis que les cavaliers continuent la grand rond jusqu'au signal du cavalier conducteur. On peut varier cette figure en faisant tourner les dames autour du cavalier conducteur et dans la meme position. Apres quelques tours, le cavalier jette une echarpe ou une sortie de bal, dont il s'est muni, sur les epaules d'une dame avec laquelle il danse, tandis que le grand rond continue. Les Fleurs ou les Animaux . Apres la promenade, le cavalier conducteur va trouver trois ou quatre cavaliers et leur demande a voix basse quelques noms de fleurs ou d'animaux; puis il va trouver autant de dames qui choisissent le nom de fleur ou d'animal qui leur plait le plus. Elles dansent alors avec le cavalier dont elles ont pris l'embleme. Le Jeu de Cartes . Apres la promenade, le cavalier conducteur prend les rois, les dames et les valets d'un jeu de cartes. Il fait tirer les rois et les valets a huit cavaliers et remet les dames a quatre dames de la societe. Les dames font la promenade avec les rois de leur couleur, tandis que les valets suivent les couples de meme couleur en les eventant avec les eventails des dames. Les Mouchoirs . Le cavalier conducteur presente son chapeau aux dames qui y deposent leur mouchoir, puis il fait choisir les mouchoirs par autant de cavaliers, qui La Danse. 5 dansent avec la dame a laquelle le mouchoir choisi appartient. La Prison . Si le local dans lequel on danse est divise en deux pieces, les cavaliers se retirent dans l'une, dont ils entrebaillent la porte ou soulevent legerement la tapisserie, afin de permettre aux dames, restees dans l'autre piece, de passer leur mouchoir par cette ouverture. Chaque cavalier saisit un des mouchoirs, puis, tous ouvrent la porte, en semblant delivrer les prisonnieres, et dansent avec les damas qui tiennent l'autre bout du mouchoir. Si le bal n'a lieu que dans une seule piece, on varie ainsi la figure : les cavaliers se retirent derriere les rideaux ou les tapisseries et passent leur main, que les damas saisissent, sense pour les delivrer. Chaque dame danse ensuite avec le cavalier dont elle tient la main. Le Colin-Maillard. On place au milieu du salon une chaise sur laquelle vient s'asseoir un cavalier auquel on bande les yeux. Apres un tour de promenade execute par les couples autour de lui, un cavalier presente au colin-maillard un objet quelconque que celui-ci doit toucher seulement du bout du doigt et d'une seule main , puis il dit ce qu'il croit avoir touche. S'il devine, il danse avec la dame du cavalier qui prend sa place, sinon le cavalier lui laisse sur les genoux on sur les bras meme sur la tete, l'oojet qu'il n'a pas su deviner et tous les couples recommencent la promenade. A un second tour, un autre cavalier presente un autre objet. Si le colin-maillard devine, celui qui doit le remplacer prend tous les objets dont l'autre etait charge, sinon, ii laisse l'objet au cavalier assis. Cette figure dure tant que le colin-maillard peut tenir d'objets, parmi lesquels figurent quelquefois les plus bizarres. Le Huit . Apres la promenade, quatre couples se forment au millieu du salon; deux restent immobiles et assez eloignes l'un de l'autre, pendant que les deux autres dansent autour d'eux en formant un [???]. Apres un tour de promenade les deux couples s'arretent et se placent comme les deux autres, qui, a leur tour, executent la meme figure. Tous les couples la terminent par une promenade generale. Les Serpents. Premiere figure. Apres la promenade, tous les couples se forment en rang, les uns derriere les autres, quoique un peu espaces le couple conducteur le dernier. Le cavalier conducteur et sa dame commencent la figure en passant entre le couple qui le precede et celui place en avant de ce dernier; ils serpentent ainsi jusqu'a ce qu'ils soient sortis des rangs et continuent la promenade. L'avant-dernier couple, qui se trouve maintenant le dernier, passe et repasse entre les couples places devant lui. Les autres couples repetent la meme figure jusqu'a ce que le couple place en tete se trouve seul; il continue la promenade jusqu'au signal d'arret. Deuxieme figure. Le cavalier conducteur place les dames du cotillon sur trois rangs, deux par deux ou trois par trois, selon le nombre de danseuses; puis, il va choisir autant de cavaliers qu'il y a de dames. Les cavaliers se tiennent par la main, le conducteur en tete. Ils font un tour autour des dames en se suivant les uns les autres, puis le cavalier conducteur penetre avec les autres cavaliers entre le dernier rang des dames et celui du milieu, puis il revient entre celui du milieu et le premier, enfin il arrive devant le premier. La, il donne le signal; les cavaliers se separent et tous dansent avec les dames qui doivent leur faire face. Dans cette figure, assez difficile a bien executer, les cavaliers doivent se disposer de facon a s'allonger en faisant le serpent, pour que le dernier cavalier reste a l'entree du dernier rang pendant que le cavalier conducteur se trouve en tete. Les Berceaux . Apres deux tours de promenade, le cavalier conducteur donne le signal et les danseurs s'arretent. Le couple conducteur se place au milieu du salon, et, s'eloignant l'un de l'autre, le cavalier et sa dame forment un berceau sous lequel passent tous les couples jusqu'au dernier en se tenant par la main. Des qu'un couple a passe, il forme le berceau qui se compose d'autant d'arcades qu'il y a de danseurs. Le cavalier conducteur et sa dame, qui se trouvent alors les derniers, passent a leur tour, et, sortis da berceau, ils font une promenade; le second couple les imite, puis le troisieme, et ainsi de suite jusqu'au dernier qui continue la promenade tant que le signal d'arret n'a pas ete donne. Le Dais . Le cavalier conducteur dispose en croix deux echarpes on deux rideaux attaches par le milieu et en confie les quatre extremites a quatre cavaliers, qui, les tenant de la main gauche, les elevent au-dessus de leur tete et tournent doucement. Pendant ce temps, le cavalier conducteur choisit un couple qui danse au milieu des echarpes, tandis que les quatre cavaliers forment le dais avec les echarpes au-dessus de la tete des danseurs. La Corbeille . Apres la promenade, le couple conducteur se separe, le cavalier prend avec lui deux dames, tandis que la dame amene deux cavaliers. Les six danseurs, places en face les uns des autres, le couple conducteur en vis-a-vis, font deux en-avant-six. La seconde fois, le cavalier conducteur leve les bras de ses deux dames pour laisser passer entre elles et lui les deux cavaliers de face. Ceuxci passent en effet sans quitter la main de leur dame qui se trouve arretee par le cavalier conducteur. Dans cette position, les deux cavaliers qui ont passe sous l'arcade se donnent la main derriere le cavalier conducteur, tandis que les deux dames choisies par lui, se donnent la main derriere la dame de vis-e-vis. La corbeille ainsi formee, les danseurs font un tour de droite a gauche. A ce moment, le cavalier conducteur passe a reculons sous les bras des deux cavaliers, qui se trouvent derriere lui, et sans quitter les mains de ses deux dames. De meme, la dame qui lui fait vis-a-vis passe a reculons sous les bras des deux dames placees en ce moment derriere elle, et sans quitter les mains de ses cavaliers. La corbeille se trouve ainsi reformee et on refait un nouveau tour, mais de gauche a droite. Enfin les danseurs se separent, et tous font la promenade, le cavalier conducteur avec sa dame qui lui fait vis-a-vis et chaque cavalier avec chaque dame placee pres de lui. Cette figure est d'un tres-joli effet mais d'une grande difficulte, et demande beaucoup d'entente de la part des danseurs qui la composent. Les Moulinets . Premiere Figure. Les cavaliers, se reunissant par la main de maniere a former un moulinet, presentent la main gauche a leurs dames, et tous le dansent a la fois. Trois couples se detachent du moulinet et dansent dans ses ailes, pendant que les autres danseurs ne font plus que marcher en marquant la mesure. Apres deux tours, les danseurs qui forment le moulinet reprennent leur mouvement, et les trois couples, qui s'en sont detaches, tournent autour d'eux en polkant et en se tenant par la main, mais en sens inverse. Apres deux nouveaux tours, les trois premiers couples reprennent leurs places au moulinet et les trois autres executent la meme figure. La premiere fois, les dames occupent le centre, et, la seconde, les cavaliers s'y placent, les dames se trouvant en dehors. Dauxieme Figure. Les danseurs se placent en rond, un cavalier et sa dame alternativement, tous se donnant la main en moulinet. Ils font ainsi deux tours apres lesquels chaque dame avance d'un cavalier; puis, deux nouveaux tours jusqu'a ce que la premiere dame ait retrouve son cavalier. La figure se termine ainsi. Troisieme Figure. Les cavaliers, apres un tour de promenade, conduisent chacun sa dame sur un cote du salon, de facon a laisser le plus d'espace libre. Ils se reunissent en moulinet, au centre du salon dans le meme ordre ou sont placees les dames, puis ils tournent devant elles. Au premier tour, le premier cavalier se detache et danse avec sa dame autour du moulinet, en ayant soin de ne pas le gener; au second tour, le deuxieme cavalier en fait autant et ainsi de suite jusqu'au dernier qui continue la promenade. Quatrieme Figure. Apres un tour de promenade, les cavaliers se placent au centre en se donnant la main gauche, et presentent la droite a leurs dames, qui leur donnent egalement la main droite. Dans cette position, tous forment un moulinet pendant un tour. Au second tour, les dames quittent la main de leur cavalier, se reunissent au centre en se donnant la main gauche, et donnent la droite a leurs cavaliers, places cette fois en dehors. Les danseurs forment ainsi unsecond tour, mais en sens inverse. En executant cette figure, les dames doivent marcher devant elles, et les cavaliers a reculons. Apres le second tour, chaque danseur reprend sa dame et fait une promenade avec elle. Cinquieme Figure. Apres un tour de promenade, chaque couple se met en place comme pour le quadrille. Les dames quittent leurs cavaliers, se reunissent au milieu du salon et font deux tours de moulinet. Au second tour, chaque dame va prendre le cavalier place a la droite du sien, execute avec lui un tour de main, et retourne se joindre aux autres dames qui reforment un nouveau moulinet, et ainsi de suite, jusqu'a ce qu'avancant toujours d'un cavalier, chaque dame retrouve le sien. Alors les couples font une promenade. Les Lignes . Premiere Figure. Apres un tour de promenade, quatre couples seulement commencent la figure. Ils se rangent sur deux lignes, comme pour les Lanciers , et vont deux fois en avant-huit. La seconde fois, les cavaliers changent de dames en faisant un tour de mains et les huit danseurs se rangent encore en ligne sur le cote oppose du salon ou il recommencent un en-avant-huit. Puis chaque cavalier reprend sa dame et les quatre couples font un tour de promenade. Si le cotillon se compose de quatre autres couples, ceux-ci repetent la figure a leur tour. Deuxieme Figure. Apres un tour de promenade, chaque cavalier se separe de sa dame et se place en face d'elle, de maniere a former deux lignes, l'une de dames, l'autre de cavaliers. Le couple conducteur, place a la tete des lignes, les redescend et les remonte en polkant, puis ils se separent, la dame fait une reverence au premier cavalier de la ligne qui lui rend un salut; de son cote, le cavalier en fait autant avec la premiere dame de la ligne. Puis, ils se reunissent, font un tour de main entre eux et repetent la meme figure avec le second couple, et, ainsi de suite, jusqu'au dernier. Ils se rangent ensuite a la fin de la ligne qui remonte pour leur faire place. Alors le second couple repete la figure, et ainsi de suite jusqu'au dernier. Lorsque tous les couples l'ont executee, ils font ensemble un tour de promenade. Le changement de Dames . Tous les couples font une promenade en ayant soin de bien conserver leur place. Au signal du cavalier conducteur, les cavaliers quittent leurs dames et continuent la promenade avec la dame du cavalier suivant, et ainsi de suite, jusqu'a ce que chaque cavalier ait retrouve sa dame. Cette figure peut tres-bien se faire l'avant-derniere, avant le salut qui clot la soiree. Le Salut . (Cette figure est la derniere du Cotillon.) On place un fauteuil au milieu du salon. Le cavalier conducteur offre la main a la maitresse de la maison et la conduit au fauteuil dans lequel elle s'assied. Alors tous les danseurs font la promenade autour d'elle; puis, les couples s'arretent; le cavalier conducteur tenant sa dame par la main salue profondement la maitresse de la maison, et tous les autres l'imitent jusqu'au dernier couple. Le bal est termine! THEORIE DE LA DANSE THEATRALE. CHAPITRE V. Instructions generales pour les eleves. Vous qui vous devouez au culte enchanteur de Terpsichore, et qui aspirez a un rang honorable parmi ses adeptes; vous que la nature a doues de toutes les qualites necessaires pour obtenir votre admission dans ses temples, et qui etes determines a ne rien negliger de ce qui peut vous conduire a la perfection, observez attentivement les instructions suivantes. Le succes ou la non-reussite, dans toute etude, depend surtout de la maniere dont elle est commencee: il faut donc, avant tout, donner la plus grande attention au choix du maitre, afin de ne courir aucun risque de s'egarer avec lui. Tous les professeurs ne sortent pas d'une bonne ecole, et il y en a peu qui se distinguent eux-memes dans l'art qu'ils pretendent enseigner. Plusieurs, quoique d'une habilete ordinaire, loin d'accroitre le nombre des bons danseurs, le diminuent journellement par la methode vicieuse d'enseignement qu'ils pratiquent, et donnent a leurs eleves une foule de mauvaises habitudes qu'il est toujours extremement difficile et quelquefois impossible de leur faire perdre entierement. Ne suivez ni les preceptes de ces theoriciens sans pratique qui sont incapables de demontrer clairement les vrais principes de l'art, ni les themes empiriques de ces novateurs qui s'imaginent contribuer a ameliorer les regles elementaires de la danse, tandis qu'ils travaillent de jour en jour a la detruire. Evitez soigneusement les lecons banales de tels precepteurs, et cherchez a vous mettre sous la direction d'un maitre experimente, dont les connaissances et le talent vous menent fidelement, malgre les difficultes, a la perfection de votre art et a la superiorite sur vos rivaux. Je vous recommanderai, en premier lieu, un examen attentif de vos dispositions physiques et de votre aptitude morale a l'art que vous voulez apprendre. Pouvez-vous en etre passionne? Pouvez-vous placer vos plus cheres delices dans son etude et sa pratique? Vous convient-il et lui convenez-vous sous tous les rapports? Si votre for interieur repond negativement a une seule de ces questions, n'esperez jamais exceller dans votre art, ni meme y devenir passable ou tolerable . Ne vous laissez pas decourager par les difficultes: il n'est pas d'obstacle qu'on ne parvienne a surmonter par de la perseverance et par un exercice reitere. Souvenez-vous de l'avis du peintre a ses eleves: Nulla dies sine linea, aucun jour sans tracer une ligne . Rien de plus important pour la danse qu'une pratique continuelle; necessaire meme aux maitres, elle est indispensable aux eleves. Aucun autre art ne demande plus d'exercice; sans cela, le danseur que l'exercice a rendu parfait ne peut se maintenir a ce degre de perfection; il perd de suite ce qui lui avait coute tant de peine a acquerir; son equilibre devient moins assure, ses elans motos elastiques, et il trouve enfin qu'etant moins leste en tout, il a de nouveau beaucoup a travailler, ll n'en est pas de meme pour la musique et pour le chant: une bonne oreille, une belle voix, suffisent ordinairement, avec quelques annees d'etude, pour surmonter toutes les difficultes. La peinture n'exige pas autant d'application de la part du maitre et de celle de l'ecolier, que la danse, qui, ainsi que tous les exercices du corps, ne peut s'acquerir et se conserver que par beaucoup d'etude et d'assiduite. Ne restez donc jamais vingt-quatre heures sans vous exercer. L'eleve qui interrompt souvent ses etudes apporte ainsi lui-meme un grand obstacle a ses progres; toutes les lecons qu'il prend, quand elles ne se suivent pas regulierement, ne peuvent contribuer a le rendre un bon danseur; et ce serait peu de chose qu'une perte de temps aussi considerable, que je l'engagerais a l'employer d'une maniere plus profitable. Gardez-vous cependant de vous jeter dans les extremes; car trop d'exercice est aussi prejudiciable que trop peu. L'exces en tout est un defaut, et rappelez-vous cette maxime philosophique: La moderation est le tresor du sage . Soyez sobre et temperant, si vous voulez devenir un danseur parfait. Pour vous rendre tout-a-fait digne de l'autel de Terpsichore, sacrifiez successivement tout autre plaisir a celui que cette La Danse 6 deesse procure. Ne melez aucun autre exercice a celui de la danse: l'equitation, l'escrime, la course, etc., sont les plus grands ennemis des progres d'un eleve de Terpsichore. Ne vous fiez pas a vos qualites naturelles, et ne negligez pas plus l'etude et l'exercice de la danse que ceux qui ont ete moins favorises que vous par la nature; car meme avec les dons les plus heureux, vous auriez tort d'esperer atteindre a la perfection de votre art, sans etude, sans travail et sans perseverance. Appliquez-vous particulierement a etudier la meilleure maniere de tenir vos bras et votre corps que vos mouvements soient aises et gracieux, et habituez-vous a remuer vos jambes de facon a conserver toujours une parfaite harmonie entre vos bras et vos jambes. Dessinez vos formes avec gout et elegance, mais sans affectation. Toutes les parties du corps doivent etre en harmonie l'une avec l'autre dans leurs mouvements, c'est la le plus haut point de perfection. Dans vos lecons et vos exercices , regardez egalement vos deux jambes, afin que l'execution de l'une ne surpasse pas celle de l'autre. J'ai vu beaucoup de danseurs qui ne dansaient que d'une jambe; je les compare a ces peintres qui ne peuvent dessiner des fig'ures que d'un seul profil. Des danseurs et des peintres de cette force ne peuvent certainement pas etre regardes comme de bons artistes. Le danseur doit s'efforcer de dessiner sa personne d'une maniere gracieuse et de varier legerement son atitude a chaque repos. Prenez un soin special d'acquerir de l'aplomb et de l'equilibre. Sage, correct et tres-precis dans l'execution; Brillant et leger dans les pas; naturel et elegant dans toutes les attitudes, un bon danseur doit toujours pouvoir servir de modele a un peintre ou a un sculpteur. C'est peut-etre le plushaut degre de perfection et le But qu'on doit s'efforcer d'atteindre. Le celebre Gardel pense que, pour juger le merite d'un danseur, il faut le saisir quand il se place en attitude, ou dans le moment de son elevation quand il execute quelques mouvements difficiles. Si, dans sa pose et son execution, il emploie les principes veritables de l'art; si son corps, ses bras et ses jambes sont dans une harmonie parfaite; si, enfin, toute sa personne est digne d'attirer l'attention du peintre, c'est un danseur parfait, et qui merite la palme. Gardel prouve, par cette observation, combien etaient profondes ses connaissances dans l'art de la danse, et combien il est difficile d'atteindre la perfection dans cet art. Ayez une sorte d' abandon ou de negligence gracieuse dans vos attitudes, dans vos groupes et dans vos pas; que votre air soit anime et expressif. Les grands temps doivent se faire elegamment et correctement. Point de monotonie dans vos pas et dans vos entrechats. La rapidite donne aux pas un brillant qui rend leur effet plus delicieux. Soyez vigoureux, mais evitez la raideur; lachez d'acquerir de la facilite dans vos elans, que vos entrechats soient aises, precis et bien croises. La rapidite est tres-agreable dans un danseur, mais la legerete l'est plus encore; l'une donne du brillant a l'execution, l'autre a quelque chose d'aerien qui plait a l'oeil du spectateur. Observez le ballon , rien ne peut etre plus delicieux que de vous voir bondir avec une elasticite gracieuse dans vos pas, touchant a peine la terre, et semblant a chaque instant sur le point de voler dans l'air. Que votre execution soit progressive, et menagee de maniere a donner une espece d'ombre et de lumiere a l'execution. La vivacite et la legerete sont. des qualites essentielles pour un bon danseur; le spectateur est charme de lui voir quelque chose de plus que terrestre . Conservez un equilibre parfait dans l'execution de vos pirouettes, et soignez-en le commencement et la fin. Posez avec assurance et rectitude, en maintenant le corps et les membres dans la position que nous indiquerons dans les chapitres suivants. Efforcez-vous de tourner delicatement sur la pointe des pieds; car, qu'y a-t-il de plus desagreable a la vue qu'un danseur lourd et maladroit, qui se tortille alternativement sur les talons et sur les pointes, et qui secoue etrangement son corps a chaque tour de pirouette. Etudiez attentivement vos pas; essayez de varier sans cesse vos enchainements, vos figures, vos attitudes et vos groupes: la variete est un des plus grands charmes de la nature: vous ne pouvez plaire longtemps au spectateur qu'en changeant souvent vos compositions." ( Dauberval ). Les enchainements, dans la danse sont tres'nombreux. Chaque bon danseur a un mode particulier de combiner ses periodes, ses pas, etc. Formezvous donc un style qui soit a vous; car l'originalite est le moyen de vous distinguer. En plant les autres, vous pouvez peut-etre les surpasser quelquefois, mais le defaut de nouveaute prive votre danse de toute espece d'attrait. Il en est de la danse comme de la musique, et du, lanseur comme des ,nusiciens: notre art n'est pas plus riche en pas fondamentaux que la musique ne l'est en notes; mais nous avons des octares, des rondes, des blanches, des noires, des temps a compter, et une mesure a suivre; ce melange d'un petit nombre de pas et d'une petite quantite de notes offre une multitude a'enchainements et de traits varies; le gout et le genie trouvent toujours une source de nouveaute en arrangeant et en retournant cette petite portion de notes et de pas de mille sens et de mille manieres differentes; ce sont donc ces p@s lenls et soutenus, ces pas vifs, precipites, et ces temps plus ou moins ouverts, qui forment cette diversite continuelle. Imitez la peinture dans vos combinaisons et vos arrangements; que tous les objets du tableau soient l'un par rapport a l'autre dans une stricte harmonie, que l'effet principal soit enleve, chaque teinte (si l'on peut se servir de cette expression pour des pas et des attitudes) se fondant ensemble pour former un tout harmonieux et de bon gout. Suivez d'une oreille vigilante les mouvements, les repos et la cadence de la musique, afin que votre danse soit en accord parfait avec l'accompagnement; tout depend de cette union melodieuse, et lorsqu'elle est parfaite, rien n'est plus seduisant. ll est necessaire pour l'artiste de mettre ses jambes, son corps et ses bras en harmonie avec le son; cette harmonie et le talent d'approprier ses pas au temps, a la cadence et au caractere de la musique, sont des qualites essentielles dans notre art, et en sont en quelque sortela vie. Il n'y a pas un seul oeil qui ne suive avec delice le danseur; il n'y a pas une orcille sensible aux impressions de la musique qui ne sort flattee d'un accord aussi harmonieux et aussi ravissant. Observez attentivement et examinez judicieusement tout ce qui concerne votre art; ne rejetez aucun avis, quel qu'il soit, et tirez-en le profit que votre jugement vous indiquera erre le meilleur; ne dedaignez pas meme d'apprendre d'un inferieur: un mauvais danseur peut quelquefois avoir dans le style de sa danse quelque chose de bon qui vous a jusqu'alors echappe. Un mince figurant ou meme un homme sans gout peuvent donner parfois un conseil salutaire. Ne craignez pas d'importuner votre maitre de questions; raisonnez librement avec lui de l'art qu'il vous montre; si vous vous trompez, ne rougissez pas d'avouer votre meprise en le consultant, mais profitez a tous egards de ses opinions, cuirez sa direction et mettez sur-le-champ ses preceptes eu pratique, afin de les fixer des lors plus fermement dans votre memoire. Ne vous departez jamais des vrais principes, et ne cessez de suivre les meilleurs guides; surtout ne vous laissez jamais entrainer par le dangcreux exemple de ces miserables baladins qui escamotent des applaudissements a un public peu connaisseur, par des tours de force, des gambades et des pirouettes ridicules. Soyez certains que les lauriers de ces pitoyables farceurs se faneront bien vite. Le danseur doit se mouvoir avec gout et decence; que tout chez loi soit naturel et que rien ne soit lascif. C'est precisement ce que le spectateur doit admirer dans les danseurs de notre classe: Faisance, l'elasticite, la grace et la decence doivent toujours etre preferees aux mouvements extravagants, aux contorsions et aux grimaces des baladins et des courtisanes. L'approbation des hommes distingues de l'art, les seuls juges que l'on doive rechercher et consulter, sera toujours un aiguillon suffisant pour un homme de talent, qui ne peut avoir qu'un souverain mepris pour les louanges prodiguees par des fous a chaque parade d'un charlatan. L'aisance et le moelleux dans l'execution, je vous le repete, doivent toujours etre pour vous le but vers lequel vous devez tendre; en les acquerant, vous prouverez que l'exercice vous est naturel, que vous avez surmonte les plus grandes difficultes, et que vous possedez a fond votre art. Quand vous aurez atteint cette qualite, que je puis appeler le plus haut degre de l'echelle de perfection, chaque suffrage vous sera acquis et vous meritera le nom de danseur accompli. Examinez bien le style de danse qui vous convient le mieux. Rien ne montre plus le manque de gout d'un danseur que le choix d'un style qui ne va pas a ses moyens: peut-il y avoir rien de plus ridicule aux yeux que l'aspect d'un danseur d'une taille haute et majestueuse, ne pour la danse serieuse, executant des pas villageois dans un petit ballet comique? Et d'un antre cote, quoi de plus plaisant qu'un epais danseur, d'une petite stature, s'avancant affuble d'un travestissement mimique, et figurant gravement dans un lent et triste adagio! Les anciens, par la purete de leur gout, nous ont donne un bel exemple de severite a suivre envers les danseurs de cette sorte. Le danseur et l'acteur doivent considerer leurs formes et leurs moyens physiques avant d'adopter un style particulier de danse ou de jeu, afin de ne prendre aucun autre caractere que celui que la nature les a destines a representer. La reunion de plusieurs branches de l'art en une seule personne est blamable, surtout dans certains danseurs de moyen ordre, qui, par leurs efforts a briguer les premieres faveurs de Terpsichore, semblent s'appliquer a degrader leur art enchanteur. Quant a ceux dont la taille n'est ni tres-elevee ni tres-courte, et qui d'ailleurs sont doues de l'habilete requise, ils peuvent s'exercer dans toute espece de genre; la pratique et l'etude peuvent meme les faire briller dans des genres differents. Il n'en est pas ainsi d'un danseur de haute stature: il est force d'adopter exclusivement le genre serieux et heroique; quant au danseur au-dessous de la taille moyenne, qu'il se livre a la pastorale ou au demi-caractere . Vous devez toujours varier votre style suivant votre habillement: il serait de mauvais gout de danser de la meme maniere sous un costume antique ou romain, ou sous l'habitlement rustique d'un moderne villageois. Les hommes de genie, poetes, peintres ou musiciens, ont toujours evite soigneusement la confusion de caractere et d'expression de personnages et de styles differents; ils en ont toujours etudie la distinction. Suivez leur exemple: une telle imitation de votre part prouvera un excellent jugement et vous aidera puissamment dans vos progres jusqu'a la perfection. La musique dansante d'un ballet doit etre plus legere, d'un accent et d'une cadence moins prononces que la musique vocale; et comme elle doit se preter a une grande variete de poses, elle doit etre tres-variee. C'est la musique seule qui peut donner au danseur ou au mime cette chaleur d'expression que les paroles inspirent au chanteur. La musique doit suppleer, dans le langage de l'ame, a tout ce que la danse ne peut exprimer aux yeux des spectateurs par ses attitudes et ses gestes. Un auteur anonyme dit, en parlant de la musique et de la danse: "Ces deux arts sont freres et se tiennent par la main; les accents tendres et harmonieux de l'un excitent les mouvements agreables et expressifs de l'antre; leurs effets reunis offrent aux yeux et aux oreilles des tabieaux unimes; ces sons portent au coeur les images interessantes qui les ont affectes; le coeur les communique a l'ame, et le plaisir qui resulte de l'harmonie et de l'intelligence de ces deux arts enchaine le spectateur et lui fait eprouver ce que la volupte a de plus seduisant." La pantomime a sans doute beaucoup d'expression; mais, sans les accents melodieux de la musique, elle ne pourrait remuer entierement l'ame. CHAPITRE VI. Enseignement du maitre. NOUVEAU MODE D'INSTRUCTION. Un danseur, apres avoir ete eleve dans les meilleures ecoles, ne doit s'en rapporter qu'a son execution pour obtenir le premier rang, et celui qui ne connait que la theorie de l'art, ne peut jamais etre un bon guide. Un arliste doit etre au premier rang des danseurs executants, avant de pretendre au titre de maitre; autrement il ne peut qu'enseigner d'une maniere vulgaire; ses lecons n'auront rien de positif et manqueront toujours de force et de rectitude. Incapable d'inculquer les vrais principes d'une bonne execution, il ne donne a son eleve aucun moyen de succes et de distinction. Un danseur.. sortant des mains inhabiles d'un tel maitre, ne peut rien faire de bien, puisqu'il n'a pas suce les vrais principes de l'art, et son execution restera toujours froide, inexpressire et depourvue de graces. Il ne montre au spectateur qu'une peinture dessinee d'une maniere incorrecte, d'un faible coloris, sans aucunes nuances de lumiere, d'ombres, de plans, et completement depourvue d'effet; et s'il ne possede ces qualites de dessin et de coloris, non moins essentielles au danseur qu'un peintre, c'est en vain qu'il espere plaire au spectateur ou l'interesser. J'ai vu d'ailleurs des exemples de danseurs eleves a une bonne ecole, qui, n'etant pas capables, par quelque circonstance particuliere, d'atteindre la preeminence au theatre, se sont mis a enseigner et out forme d'excellents danseurs. Mais le nombre de ces professeurs est bien faible en comparaison de ceux qui ne s'etant pas distingues par leur execution, sont incapables de former un danseur fini. Un maitre, auquel beaucoup d'experience et une longue pratique ont donne des vues plus elevees que celles du vulgaire, doit toujours, avant de commencer un eleve, examiner si sa conformation est susceptible des attitudes et des mouvements de la danse; et, dans le cas ou l'eleve doit prendre de la croissance, s'il possede nu port elegant, un maintien gracieux, et une grande flexibilite des membres, car sans ces dons naturels et ces dispositions a faire de rapides progres dans ses etudes, l'eleve ne pourra jamais non plus acquerir de reputation. Un acteur fameux avait coutume de dire qu'il etait impossible d'exceller au theatre, sans l'aide de la nature. Ces mots, que l'experience ellememe a dictes, sont d'une verite parfaite. L'age de huit ans est le meilleur pour commencer les elements de la danse; le jeune eleve est en etat de bien comprendre sur-le-champ les demonstrations du maitre, qui, parfaitement capable de juger les formes de l'eleve, l'instruit de la maniere la plus avantageuse. Des que le maitre a prepare l'eleve par les premiers exercices, il doit lui faire etudier sa lecon; il le perfectionne ainsi dans les temps d'ecole sur les pas principaux de la danse, avant de passer outre, et de lui donner le genre d'execution qui convient le mieux a son sexe, a ses dispositions et a sa conformation. Les hommes doivent danser d'une maniere differente des femmes; les temps de vigueur, et l'execution male et energique des premiers seraient d'un effet desagreable chez les dernieres, qui doivent se distinguer et nous recreer par des pas brillants et par des mouvements gracieux, par des terre-a-terre elegants et par un abandon decent et voluptueux a la fois dans toutes leurs attitudes. Hommes ou femmes, des que la taille est elevee, le maitre doit les consacrer a la danse la plus serieuse et la plus noble; si la taille est moyenne et les formes sveltes et delicates, ce soui des sujets pour le demi-caractere ou genre mixte; si la taille est au-dessous de la moyenne, la conformation vigoureuse, les muscles epais, ce sont des eleves pour le genre comique et les pas de caractere. Le maitre deyrait finir toutes les instructions par inculquer dans l'ame de ses eleves le desir de se bien penetrer de l'esprit veritable et des charmes de l'art; il faut qu'i] marque soigneusement la difference entre chaque espece de danse, qu'il fixe avec precision chaque execution, et enfin qu'il familiarise l'eleve avec chaque genre de danse et avec le costume qui appartient a chacun d'eux. Un maitre ne peut trop fortement recommander a ses ecoliers d'avoir sans cesse devant les yeux les beaux modeles de peinture et de sculpture des grands maitres; ces chefs-d'oeuvre de l'antiquite qui ont echappe a la destruction des siecles, ces exemples entrainants du beau ideal dans les beauxarts, contribueront beaucoup a leur former le gout. Un danseur qui ne sait pas comment se developoper, se dessiner lui-meme, qui manque de graces, qui est depourvu de gout, ne peut jamais faire le moindre plaisir a un connaisseur, ni meme a un spectateur instruit. Si l'eleve est doue du genie de la composition et d'une imagination creatrice, le maitre habile dans son art lui laissera exercer ses forces dans l'invention et la combinaison des pas, et lui fera connaitre les plus beaux dessins de la choregraphie. A l'age de vingt-trois ou vingt-quatre ans, un danseur doit avoir acquis tout le mecanisme de son art et posseder l'execution la plus brillante La Danse 7 qu'il soit possible d'atteindre. Dans la danse, le talent ne s'estime pas par le nombre des annees qu'on a mis a la pratiquer, et cependant un artiste ne devient pas un danseur du dernier rang parce qu'il avance en age. A quarante ans, un danseur, s'il est d'une bonne ecole, et s'il a eu soin de se maintenir, par une pratique constante, a la hauteur ou il s'est eleve peut encore etre un artiste du premier ordre; nous en avons plus d'un exemple. Je finirai ce chapitre en recommandant a l'attention du maitre et de l'eleve l'etude du dessin et celle de la musique comme indispensables a tout bon danseur. Le dessin vous suggerera des poses gracieuses et elegantes, surtout si vous cherchez ce beau ideal qui est le but de notre art. La musique precisera vos pas; vos oreilles s'habitueront au temps et a la cadence de l'accompagnement; et tous vos mouvements seront d'accord avec le rhythme du ton. La musique et le dessin vous donnent aussi beaucoup de facilite pour composer; quels que soient d'ailleurs votre genie et la puissance de votre imagination, vos productions ne pourront manquer d'etre correctes. CHAPITRE VII. etude pour les jambes. Dans les diverses attitudes d'un danseur, ses pieds ne doivent pas etre tournes entierement; s'ils entrent en position, ils perdent toute leur grace. Efforcez-vous donc d'acquerir de la facilite a tourner vos jambes, et, pour atteindre ce but, ayez beaucoup d'aisance a partir des hanches; que vos cuisses se meuvent librement, et que vos genoux soient bien tournes en dehors. A force d'exercice et d'attention, vous en viendrez a bout sans de trop grands efforts. On n'estime jamais un danseur dont les hanches sont trop contractees, et dont les jambes no peuvent se tourner entierement en dehors; ces defauts privent se danse de son plus grand charme. Mais celui dont les mouvements sont libres et souples, dont le coudepied, bien detache, permet a la pointe, vigoureuse et elastique, de se maintenir basse, a vraiment un aspect enchanteur. Quelques jeunes gens ont recu de la nature des membres tournes en dehors, et ils ont ainsi un grand avantage sur ceux dont les jambes sont en dedans; ces derniers ne peuvent meme raisonnablement esperer devenir bons danseurs, malgre leurs soins et leur travail. L'exercice les aidera a bien tourner leurs pieds et a tendre la plante des pieds un peu en bas, mais les cuisses et les genoux resteront toujours dans leur etat naturel. On peut voir par la combien il est necessaire a celui qui se voue a l'etude de la danse d'examiner attentivement les formes de son corps et ses moyens naturels, avant de commencer les premieres lecons d'un art dans lequel il est impossible de reussir sans plusieurs dons de la nature. Soyez attentif, en vous exercant, aux mouvements et aux positions du coude-pied; qu'ils soient constants dans leur force et leur elasticite, et que jamais l'une des chevilles no soit plus haute que l'autre; relacher le coude-pied est un defaut tres-grave. Rendez le coude-pied aussi haut et aussi gracieux que possible, et donnez-lui assez de force pour l'execution des mouvements rapides, vigoureux et eleves. L'action da coudepied consiste principalement a elever et a abaisser le talon; etudiez-vous surtout a la rendre aisee et forte, car c'est d'elle que depend l'equilibre de tout le corps. Quand vous vous elancez, le coudepied porte tout le poids du corps a sa chutee, et par un meuvement fort et rapide vous fait tomber sur les pointes. Le mouvement da genou est inseparable de celui du coude-pied, et il n'en differe qu'en etant parfaitement tendu, et la pointe du pied basse. Le mouvement de la hanche est une espece de guide pour ceux da genou et du coude-pied, car il est impossible a ces derniers de se mouvoir si la hanche ne les y determine. Dans quelques pas, les hanches seules sont en mouvement, comme dans les entrechats, battements tendus, etc. Les danseurs qui ont peu de ressort naturel, ou dont les mollets sont pauvres de muscles, sont forces de recourir a leurs coudes-pieds, qui peuvent suppleer a la faiblesse des autres parties, mais non sans beaucoup de peine et d'exercise. Un exercice journalier peut leur donner aussi de la vigueur et de la rapidite; mais que ces personnes se gardent bien d'interrompre leurs travaux, si elles veulent en tirer quelque fruit. Que vos plies soient aises, precis et elegants: plusieurs danseurs s'imaginent que rien n'est plus propre a devenir liant et moelleux que de plier les genoux tres-bas, c'est une grande erreur: des plies trop has rendent la danse maigre et insipide. Vous n'acquerez pas plus tot de l'aisance et de l'elan, en pliant trop qu'en ne pliant pas du tout, et la raison en est facile a saisir, lorsque l'on considere que chaque mouvement de la danse est subordonne a la musique. Quand on plie trop bas, et que l'on emploie a un plie plus de temps que la musique ne le comporte, on est ensuite oblige de se donner un elan subit, on meme une secousse pour rattraper la mesure que l'on a perdue, et cette transaction rapide du plie au tendu est extremement rude, et produit, pour le spectateur, un effet aussi desagreable que celui qui resulte de la raideur. Le moelleux depend beaucoup d'une flexibilite proportionnee des genoux; mais le coude-pied, par son elasticite, doit contribuer a la grace du mouvement, et les reins servent comme d'une espece de contre-poids au plie, que l'elan ou le coude-pied enleve on abaisse avec douceur et elegance, le tout etant dans un accord et une harmonie parfaite. Que l'ouverture qui resulte du plie soit etablie sur ce principe, et que son dessin soit strictement conforme a la position du corps et des bras. Si votre buste est tres-long, tachez d'elever vos jambes plus que ne le prescrivent les regles ordinaires; s'il est au contraire tres court, maintenez-les plus bas que la hauteur prescrite; vous dissimulerez ainsi l'un et l'autre defaut de canformation. Dans les pas et les temps de vigueur, soyez energique et fort, mais en meme temps prenez garde que ces qualites ne degenerent en faute par de la raideur et une tension penible des nerfs. Il y a quelques personnes dont les jambes sont tres-rapprochees l'une de l'autre; chez le plus grand nombre, au contraire, les jambes sont arquees naturellement. Je vais donner les moyens de remedier a ces defauts, ou au moins de les pallier: mais il faut d'abord placer la personne les deux pieds en dedans, c'est-a-dire l'un contre l'autre. Un homme a les jambes closes quand les hauches et les cuisses sont fortement contractees, les genoux epais et paraissant se joindre, et la partie inferieure des jambes, depuis le derriere du mollet jusqu'a la cheville, formant un triangle dont la terre est la base; le dedans du coudepied tres-gros, le coude-pied haut et le tendon d'Achille mince, long et bien detache. Les jambes arquees ont le defaut contraire. Les cuisses sont trop separees, les genoux trop distants l'un de l'autre; les mollets ne se joignent pas, et le jour, qu'on ne devrait apercevoir qu'entre certaines parties, se voit dans toute la longueur des jambes, qui ont alors l'apparence de deux arcs dont les extremites sont tournees l'une vers l'autre la courbure en dedans. Les personnes ainsi conformees ont un long pied plat, le dehors da coude-pied saillant, et le tendon d'Achille epais el trop pres des jointures. Ces deux defauts naturels, si diametralement opposes, prouvent cambien les regles de l'instruction doivent varier suivant la conformation de l'eleve, et cambien il serait prejudiciable de ne snivre pour tous qu'une seule regle uniforme et invariable; car les etudes de deux danseurs de conformation si dissemblable ne peuvent en aucune maniere etre les memes. Le danseur dont les jambes sont closes doit s'efforcer d'en separer les parties qui ne le sont pas assez. Pour y reussir, qu'il s'efforce d'abord de tourner les cuisses en dehors, et de les mouvoir dans cette position, ce qui donnera de la liberte au mouvement de rotation du femur dans la cavite cotyloide de l'os de la hanche. Les genoux, aides par ce mouvement, suivront la meme direction et se mettront enfin a leur place. Les rotules, qui empechent les genoux de se courber en arriere, tomberont alors perpendiculairement dans la ligne des pointes des pieds; et les cuisses et les jambes deviendront enfin parfaitement droites et maintiendront fermement la stabilite du trone. En second lieu, il doit conserver une flexibilite constante dans l'articulation, des genoux, et faire en sorte que les jambes paraissent avoir plus d'extension qu'elles n'en ont en realite. C'est l'ouvrage du temps et de la patience, et quand une fois on en a pris l'habitude, il devient presque impossible que ces jambes reprennent leur conformation primitive et vicieuse sans des efforts penibles et insupportables. Le danseur a jambes arquees doit s'efforcer de diminuer l'arc en maintenant les jambes aussi rapprochees que possible; il lui faut, comme a celui dont les jambes sont closes, contenir bien le mouvement des cuisses en dehors; il doit de plus maintenir les genoux dans une extension constante, afin qu'ils acquierent du liant et du moelleux, et que le defaut de raideur soit ainsi masque. Cependant un danseur de cette conformation ne peut jamais reussir dans la danse serieuse et heroique; il doit se borner un demi-caractere, ou plutot embrasser la danse pastorale et des pus caracteristiques de genre. Le danseur a jambes closes est passablement bien dans la danse serieuse et demi-caractere, et, en generai, il est beaucoup plus capable que le precedent; son execution a plus d'aisance, ses mouvements plus de delicatesse, de naturel et de grace; mais, comme il possede rarement autant de force que l'autre, il est souvent force de recourir aux aides du conde-pied. Dans l'execution des entrechats, il ne peut etre brillant, mais toujours correct et elegant. Un tel danseur peut meme quelquefois aspirer a la perfection dans chaque genre, pourvn que su stature n'y mette aucun empechement. Le danseur a jambes closes doit conserver une legere flexibilite dans l'execution, et ne jamais tendre les genoux, excepte pour terminer les pas: par ces attitudes, il dissimule ainsi son defaut naturel. Le danseur a jambes arquees doit au contraire se donner de la tension autant que possible, en evitant toujours la rudesse a laquelle tend ce genre d'execution, et en croisant les jambes de maniere a faire disparaitre en grande partie l'are qui existe entre elles. Mais, malgre tous ses efforts, il n'aura jamais les memes chances de succes que le danseur a jambes closes; il a trop de force et de vigueur, pas assez de liant dans les muscles, et ses articulations ne peuvent agir avec aisance et liberte. Il est bien entendu que, lorsque le defaut d'etre arque proviet de la constitution naturelle des os, il devient impossible d'y remedier, soit entierement, soit en partie, et il faut alors renoncer a l'art de la danse. CHAPITRE VIII. Etude pour les bras. La position, l'opposition et le port des bras sont peut-etre les trois plus grandes difficultes de la danse; elles demandent donc une etude et une attention particulieres. Noverre, en parlant de l'opposition, dit que "de tous les mouvements executes en dansant, l'opposition, ou le contraste des bras avec les pieds, est le plus naturel, et cependant le moins observe." "Regardez, par exemple, plusieurs personnes se promener; vous verrez qu'en placant le pied droit en avant, le bras gauche tombe aussi naturellement en avant, et forme ainsi opposition: cela me parait une regle generale, et c'est en s'y conformant que les danseurs habiles ont acquis la vraie maniere de porter leurs bras, en les maintenant en opposition avec les pieds, c'est-a-dire que, lorsque le bras gauche est en arriere, le pied gauche doit etre en avant." Noverre, suivant moi, ne traite pas de l'opposition avec la clarte et l'exactitude que le sujet requiert; et peu d'ecrivains l'ont fait. Cette obscurite qui regne sur un des points les plus importants de la danse, a ete des-lors un sujet de controverse continuelle entre les danseurs de profession. Tachons de l'eclaircir un peu. L'opposition d'une partie d'un solide qui se meut a une autre partie, est une loi d'equilibre a l'aide de laquelle les forces de gravitation sont divisees. C'est precisement ce que Noverre veut dire quand il cite comme exemple la marche d'un homme; et lorsqu'il dit plus loin que l'opposition a lieu chaque fois que l'homme ou le danseur porte une jambe en avant, il fait ressortir que si le pied place en avant est le pied droit, le bras gauche doit naturellement se porter en avant au meme instant, tandis que les membres opposes restent en arriere; le tout formant un contre-poids a la deviation du corps de sa ligne de gravite. Cette opposition donne au danseur un aspect tres-agreable, parce qu'elle rompt l'uniformite des lignes. Il y a deux manieres de remuer les poignets, en haut et en bas. Lorsque le mouvement doit etre fait en bas, le poignet doit etre tourne en dedans, la main se mouvant en demi-cercle et retournant ainsi a sa premiere position; mais il faut avoir soin de ne pas tourner le poignet avec trop de raideur, car il paraitrait casse. Quant au second mouvement, en haut, le poignet doit etre arrondi, permettant a la main de se tourner en haut, en faisant un demi-tour; par ce mouvement, la main se trouvera dans la premiere position par rapport aux bras. Le coude, aussi bien que le poignet, a son mouvement en bas et en haut, avec cette difference que, lorsqu'on plie le coude, les poignets sont plies aussi, ce qui empeche les bras de paraitre raides et leur donne beaucoup de grace. Il ne faut pas d'ailleurs plier le poignet, de maniere a produire un effet ridicule. On doit observer la meme chose pour les jambes quand on plie le genou: c'est alors le coude-pied qui comple le mouvement en elevant le pied, de la meme maniere que le poignet et le coude. Ainsi, pour les mouvoir en bas, les bras etant places en haut, le coude et le poignet doivent etre plies, et quand les bras sont plies aussi, on doit les etendre pour completer le mouvement. Ils retournent a la premiere position ou ils etaient d'abord. Quand on fait un mouvement des poignets, ils doivent etre plies, et ensuite tendus comme lorsqu'ils sont accompagnes du mouvement des coudes. Quant au second mouvement, en haut, les mains etant placees en bas, les poignets et les coudes doivent etre plies et formant un cercle; les deux bras forment en meme temps un mouvement exactement semblable, puis retournent a leur premiere position. Un danseur qui porte bien ses bras et qui les meut d'une maniere gracieuse, suivant les vraies regles de l'art, prouve qu'il a etudie a une bonne ecole, et que son execution est invariablement correcte. Peu d'artistes se distinguent par un beau style d'execution des bras, et ce defaut provient generalement, soit de la mediocrite des principes qu'ils recoivent dans une mauvaise direction, soit meme de leur propre negligence. Ils s'imaginent, ainsi que j'en ai vu plusieurs, que, s'ils possedent une execution brillante des jambes, ils n'ont pas besoin d'y ajouter une belle position des bras, et s'exemptent ainsi du travail que demande une etude si importante. Quand les bras accompagnent exactement chaque mouvement du corps, on peut les comparer au cadre qui donne du relief a la peinture. Si le cader ne s'accorde pas avec la peinture, Si le cadre ne s'accorde pas avec la peinture, quelque bien qu'elle soit, elle perd sans doute beaucoup de son effet. Il en est de meme pour un danseur: quelque grace qu'il deploie dans l'execution de ses pas, si les bras ne sont pas souples et en parfaite harmonie avec les jambes, jamais sa danse n'aura ni grace ni agrement, et il fera toujours l'effet d'un tableau sans cadre ou mal ajuste dans la bordure. Si la nature ne vous a pas favorise de bras arrondis, vous ne sauriez y faire trop d'attention afin de suppleer par l'art a ce que la nature vous a refuse: c'est une des perfections necessaires auxquelles l'esprit de tout homme qui desire devenir artiste doit tendre constamment. Faites en sorte d'arrondir vos bras assez pour que les pointes des coudes soient imperceptibles. Le manque d'attention, a cet egard, conduit au manque de souplesse et d'elegance, et au lieu de presenter a l'oeil des contours arrondis et gracieux, on ne laisse voir qu'une serie de lignes anguleuses privees de gout et de grace, desagreables au spectateur, et l'on communique a toutes ses attitudes une apparence grotesque et caricaturale qui ne peut etre qu'un objet ridicule pour le peintre. Que la saignee du bras soit au niveau de la paume de la main, les epaules basses et toujours sans mouvements, les coudes arrondis et bien supportes et les doigts gracieusement groupes. La position et le port des bras doivent etre souples et tres-aises. Ne leur laissez faire aucun mouvement extravagant, et surtout ne leur permettez pas la moindre raideur. Gardez-vous surtout de les secouer par l'action et la reaction des jambes; c'est une grande faute et elle suffit pour faire perdre a un danseur le merite que lui donne la perfection du jeu de ses jambes. Il faut observer cependant que, dans les arabesques, la position des bras sort de la regle generale; c'est en consequence au danseur a la rendre aussi gracieuse que possible. La Danse. 8 CHAPITRE IX. Etude pour le corps . POSITIONS, POSES, ATTITUDES, DeMARCHE. Le corps doit etre, en general, droit et d'aplomb sur les jambes, excepte dans certaines attitudes, et specialement dans les arabesques, ou il faut s'incliner en avant ou en arriere, suivant la position adoptee. Il faut toujours avoir soin qu'il pese egalement sur les cuisses: la poitrine doit etre saillante, et la ceinture rentree autant que possible; conservez dans l'execution une legere courbure, mais beaucoup de fermete dans les reins et laissez tomber les epaules, la tete haute et la contenance animee et expressive. Le danseur qui veut charmer les yeux du spectateur doit deployer tonte l'elegance que son imagination peut lui inspirer, dans l'ensemble de son port, le developpement aise des membres et la grace de chaque attitude. Mais qu'il se garde, dans la danse, de l'affectation, qui gaterait tout. Par une attention soutenue vers ces deux points essentiels, il fera ressortir le brillant de sa danse a son plus grand avantage, et ne manquera jamais de recueillir le fruit de son travail. L'elegance de la partie superieure du corps doit etre principalement recherchee, car c'est en elle que consiste un des principaux merites du danseur. Portez le buste gracieusement, imprimez a ses mouvements d'opposition un certain abandon et ne laissez ainsi perdre, en aucune maniere, la beaute de la pose et la purete de dessin de ses lignes. La tete, les epaules et le buste doivent etre maintenus et encadres par les bras, qui doivent en suivre les mouvements avec assez de precision pour que le tout presente un ensemble gracieux, et nous avons deja remarque que les jambes doivent naturellement participer a l'harmonie de leurs mouvements. Autrement votre danse manquera toujours d'expression, et votre position deviendra insipide, ainsi que votre attitude. Ne laissez jamais la tete clouee perpendiculairement sur vos epaules, mais inclinez-la legerement, soit a droite, soit a gauche, soit que vos yeux s'elevent ou s'abaissent, ou se dirigent en avant; car il est essentiel que la tete ait un mouvement naturel de vivacite, et qu'elle ne paraisse pas inactive et pesante. Dans quelques-unes des premieres positions de la danse, la tete est de face; on nomme ces positions poses d'attitude . Efforcez-vous de maintenir le corps dans un equilibre parfait; que les extremites ne se departent jamais de la ligne perpendiculaire qui tombe du centre des clavicules entre les chevilles des deux pieds. Le creux de la nuque doit correspondre perpendiculairement avec les pieds; si l'on meut une jambe en avant, il se trouve en arriere de la perpendicularite du pied; si l'on meut la jambe en arriere, il se trouve en avant, changeant ainsi de place suivant chaque variation de position. Le danseur doit acquerir, outre un port gracieux, un aplomb exact, en formant contre-poids avec chaque partie du corps; c'est ainsi qu'il deviendra capable de faire porter le corps sur une seule jambe, ou d'obtenir un style d'attitude elegante sur les deux jambes. Le poids d'un homme qui repose sur une seule jambe est divise en deux parties egales au point qui supporte le tout; et des qu'il se meut, la ligne centrale de gravite passe exactement par l'axe de la jambe qui reste posee a terre. Celui qui porte un fardeau en dehors de l'axe du corps doit necessairement ajouter de son propre poids, une quantite suffisante pour former un contre-poids de l'autre cote, et determiner ainsi un equilibre parfait autour du centre de gravite; mais, dans certaines attitudes que le danseur forme en s'elevant de terre et dans les arabesques inclinees, le centre de gravite ne doit pas etre place de la meme maniere. Un danseur, quelle que soit sa direction, doit maintenir avec soin son centre de gravite sur la ligne qui le supporte. Cette position particuliere, que l'on nomme attitude , est la plus elegante, mais en meme temps la plus difficile que la danse comprenne; c'est, suivant moi, une espece d'imitation de l'attitude tant admiree du Mercure de J. Bologne. Un danseur qui etudie cette attitude, et qui l'execute bien, ne peut manquer d'etre remarque comme un homme qui a acquis les meilleures notions de son art. Rien de plus agreable a l'oeil que ces charmantes positions que nous nommons academiques , et qui derivent de quelques bas-reliefs antiques, de plusieurs fragments de peinture grecque et des peintures a fresque du Vatican, executees d'apres les beaux cartons de Raphael. Les ornements, dits arabesques en peinture, sont ordinairement composes de plantes, d'arbustes, de branches legeres et de fleurs dont les peintres enrichissent des compartiments, des frises, des panneaux, etc. En architecture, ce sont des feuillages, des tiges dont les frontons et les entablements sont souvent embellis. Le gout de ces ornements nous vient des Maures et des Arabes, dont ils ont conserve le nom. Les professeurs de danse ont aussi introduit ce terme dans leur art, pour exprimer des groupes pittoresques, formes de danseurs et de danseuses, entrelaces de mille manieres differentes par le moyen de guirlandes, d'anneaux, de cerceaux entoures de fleurs, et quelquefois d'anciens instruments champetres, qu'ils tiennent dans leurs mains. Ces attitudes enchanteresses, et ainsi diversifiees, nous rappellent ces bacchanales delicieuses que l'on voit sur d'antiques bas-reliefs; et par leur legerete aerienne, leur variete, leurs agrements et les nombreux contrastes qu'elles presentent successivement, elles ont en quelque sorte rendu le mot arabesque naturel et propre a l'art de la danse. Je puis me flatter d'etre le premier qui ait donne l'explication precise de cette expression appliquee a notre art, explication sans laquelle ce mot semblerait une derision de celui employe originairement par les peintres et les architectes, et qui leur appartenait exclusivement. Les danseurs doivent apprendre, dans ces peintures et ces sculptures pudiques, la vraie maniere de se tenir avec gout et grace; c'est a cette pure source de beautes ou doivent puiser tous ceux qui desirent se distinguer par la purete et la correction du dessin. Dans les groupes de bacchanales ci-dessus mentionnes, j'ai introduit avec succes diverses attitudes, arabesques et groupes dont l'idee m'est venue en voyant les peintures, les bronzes et les marbres provenant des fouilles d'Herculanum, et qui en ont rendu l'aspect plus pittoresque, plus caracteristique et plus anime. Ces monuments precieux de la science des anciens ont ete souvent proclames les meilleurs modeles a suivre pour les peintres et les sculpteurs, et ils ont, suivant moi, rendu un egal service aux danseurs. On execute plusieurs attitudes et arabesques sur un pied ou sur deux. Les attitudes, les poses et les arabesques peuvent varier a l'infini. Le moindre changement dans la pose du corps, dans les oppositions des bras ou les mouvements des jambes, peuvent, en se combinant heureusement, produire une immense diversite. C'est au bon gout du danseur a decider de la meilleure maniere de les combiner et de les changer, en les appropriant au style et au caractere de sa danse. Ces attitudes s'emploient beaucoup, en les modifiant, dans les enchainements des groupes. Que le corps reste en repos dans l'execution des pas; qu'il soit ferme et inebranlable, quoique souple et facile, suivant le jeu des jambes et des bras; gardez-vous surtout de la raideur. Celui qui secoue son corps en dansant, qui eleve les epaules a chaque mouvement des jambes, qui courbe ou relache les reins pour faciliter l'execution des temps, et qui montre ainsi, par des contorsions, toute la peine qu'il eprouve dans son execution, est incontestablement un objet de ridicule, et le nom de grotesque lui appartient, car il ne merite pas celui de danseur. J'ai vu maintes fois des exemples de ce mode vicieux de danse, et je ne puis l'attribuer qu'a la negligence des maitres, qui, impatients de produire leurs eleves en public, les abandonnent a eux-memes avant qu'ils aient acheve leurs etudes. Le public, par ses applaudissements trop indulgents, ou par son manque de gout, accroit aussi considerablement le nombre de ces mauvais danseurs, ou, pour mieux dire, de ces sauteurs, qui se trouvant ainsi tres-encourages, s'imaginent aussitot qu'ils ont atteint la perfection de leur art. De si miserables danseurs doivent etre bannis du theatre et relegues sur les treteaux, comme n'ayant d'autre savoir que celui de propager le mauvais gout. Demarche. Une maniere gracieuse de marcher sur le theatre est d'une grande importance pour le danseur, quoique plusieurs artistes la negligent, soit dans les moments de repos, soit dans leur entree en scene pour l'execution d'un pas. Cette negligence est un grand defaut, d'abord parce qu'elle choque l'oeil, et ensuite parce qu'elle ote toute illusion pour l'execution qui suit. Une belle demarche est tres-utile, car c'est en elle que consiste la premiere qualite d'un bon danseur: un port gracieux. Tenez toujours vos jambes bien etendues dans les mouvements ou pas, vos cuisses parfaitement tournees en dehors, et tout le bas des jambes egalement tourne en dehors; que vos pas ne depassent jamais la longueur d'un pied. Evitez la raideur des mouvements, qui ne doivent etre ni trop lents ni trop vifs, car ces extremes sont egalement deplaisants. Ne separez pas de cote vos jambes l'une de l'autre; portez la tete haute et la ceinture assuree, ce qui donne au corps une elegante position; que la poitrine soit un peu en avant, les epaules effacees, et les bras tombant naturellement. CHAPITRE X. Etude des divers pas de la danse theatrale. Ce chapitre n'est que la suite ou pour mieux dire le developpement de notre chapitre III. Nous y renvoyons le lecteur pour ne pas nous repeter ici; toutefois nous l'avertissons que, dans nos premiers chapitres, specialement reserves a la danse de societe, nous n'avons pas traite le sujet avec toute l'importance que comporte l'etude de la danse theetrale. Nous completerons done par quelques considerations generales l'exposition des principes de la danse, et nous decrirons specialement les divers pas employes le plus frequemment dans les ballets. La combinaison des exercices elementaires et des principaux pas de la danse est ce qu'on appelle ordinairement une lecon . L'eleve s'exerce d'abord a plier les genoux dans toutes les positions, a executer les grands et les petits battements, les ronds de jambe sur terre et enl'air, les petits battements sur le coude-pied, etc. Il passe ensuite aux temps de courante, simples et composes, aux coupes a la premiere, a la seconde et composes, aux attitudes, aux grands ronds de jambe, temps de chaconne, grands fouettes de face et en tournant, au quart de tour, an pas de bourree et aux divers mouvements des differentes sortes de pirouettes. Ces exercices tendent a former un bon danseur et a lui donner les moyens de reussir. La lecon se termine par l'execution des pirouttes, des temps terre a terre et des temps de vigueur. L'eleve, dans les premiers exercises, doit poser ses mains sur un appui, de maniere a se tenir droit et a employer alternativement l'une et l'autre jambe. Quand il a acquis un peu de facilite, il n'a pas besoin de la main pour se soutenir, et il doit s'exercer alors a acquerir de l'aplomb et de l'equilibre, qualites essentielles a un bon danseur. Il acquerra egalement, par ce moyen, la force et l'agilite necessaires pour executer toute espece de pas. Il devra repeter journellement cet exercice pour s'y fortifier, car le talent le plus rare a lui-meme besoin, pour atteindre la perfection, d'une application et d'une etude constantes. Mais, lorsque l'eleve est capable d'executer tous les exercices de la lecon, il ne doit pas s'imaginer qu'il est arrive au but ou il tendait. Pour devenir un danseur fini, il doit perdre cet air d'ecolier qu'il a necessairement contracte, et c'est par la hardiesse et l'aisance de son execution qu'il montre enfin qu'il est maitre en son art. Que toute son attention soit alors dirigee, s'il veut plaire aux spectateurs, sur l'elegance des positions, la grace des mouvements, l'expression animee de ses traits, et sur cet abandon aimable qui doit accompagner toute espece de danse. Ces qualites constituent un veritable danseur parfait, et elles sont entrainantes pour le spectateur. Temps . On appelle temps un mouvement de jambe. Que vos grands temps soient hardis, libres et degages; executez-lez avec precicion, et, en les commencant, soyez droits et fermes sur vos jambes. Pas . Les pas sont les divers arrangements des jambes bes qui se meuvent ou qui sautent en ligne droite ou en cercle. On appelle generalement pas , une combinaison de ces mouvements arranges sur un air. Les pas sont souvent combines pour deux, trois personnes ou plus; on les nomme alors pas de deux, de trois, de quatre, de cinq, etc. Dans tous les pas terre a terre, vous ne sauriez avoir trop d'agilite dansle coude-pied ni trop baisser les pointes des pieds; l'un donnera beaucoup de brillant a votre execution, et l'autre la rendra legere et gracieuse. Un veritable danseur doit donner a ses pas, en quelque sorte, de l'ombre et de la lumiere, et en marquer distinctement chaque variation par une grande exactitude d'execution. Dans toutes le elevations, developpez une vigueur nerveuse, et que vos pas d'elevation contrastent agreablement avec la rapidite de vos terre-a-terre, sans jamais oublier d'ailleurs, de regler le choix de vos pas sur le genre de danse que vous avez adopte, comme d'apres votre constitution. Dans les enchainements, que la variete et la nouveaute soient votre but constant; etudiez-en soigneusement la composition, et faites tout ce que votre gout vous indiquera pour etre agreable. N'y melez jamais de pas eleve ou difficiles, qui exigent de la force pour les executer, et gardezvous aussi d'y mettre de la froideur par des poses trop longues; l'un ou l'autre de ces defauts detruirait tout l'effet d'ensemble d'un enchainement correctement execute par une musique vive et entrainante. Battements . Le battement consiste dans le mouvement de la jambe qui est en l'air pendant que l'autre jambe supporte le corps. Il y a trois especes de battements, savoir: les grands battements, les petits battements et les battements sur le coude-pied . Les premiers se font en detachant une jambe de l'autre, et l'elevant a la hauteur de la hanche dans toute son etendue. Apres l'execution du battement, les jambes se placent de nouveau en cinquieme position. On les croise derriere ou devant. Les grands battements forcent le danseur a tourner completement ses jambes en dehors, et lui donnent beaucoup de facilite pour les mouvements et l'execution des grands temps. Les grands battements se font en avant et en arriere. Les petits battements se font de la meme maniere; mais, au lieu d'elever la jambe en l'air, on la detache seulement un peu de l'autre jambe sans que les pointes quittent la terre. Ces battements rendent la jambe legere, parce que l'eleve est oblige d'en redoubler les mouvements. Petits battements sur le coude-pied . C'est la hanche et le genou qui preparent ces mouvements; la hanche guide la cuisse dans son ouverture, et le genou, par sa flexion, acheve le battement en forcant la partie la plus basse de la jambe de croiser, soit en avant, soit en arriere de la jambe qui reste a terre. Supposons que vous posiez sur le pied gauche, la jambe droite en seconde position et le pied droit touchant la terre avec le talon; croisez devant la jambe gauche en pliant le genou et l'ouvrant de cote, pliez le genou de nouveau en croisant le pied en arriere, ouvrant aussi de cote, et ainsi de suite pour executer plusieurs de ses battements l'un apres l'autre; augmentez graduellement la rapidite des mouvements jusqu'a ce qu'elle soit telle que l'oeil ne puisse la suivre. Ces battements sont d'un tresjoli effet et donnent beaucoup de brillant au mouvement des jambes. On doit aussi en executer beaucoup en laissant les deux jambes sur les pointes. Ronds de jambe . Pour commencer les ronds de jambe en dehors, prenez la position indiquee pour les petits battements. Supposons que ce soit la jambe gauche qui pose a terre pendant que la droite, en seconde position, est preparee pour le mouvement et faiteslui decrire un demi-cercle en arriere, ce qui porte les jambes a la premiere position, et continuez alors sur ce mouvement jusqu'a ce que le cercle soit complet, finissant a la place d'ou le pied est parti: c'est ce qu'on nomme techniquement un rond de jambe. Les ronds de jambe en dedans se commencent a la meme position; mais la jambe droite, au lieu de commencer le cercle en arriere, le commence en avant. Quand l'eleve les ronds de La Danse . 9 jambe sur terre, il doit s'exercer a les executer en l'air, en elevant la jambe qui supporte le corps sur la pointe du pied. Entrechat . L' entrechat est un pas leger et brillant. Pendant son execution, les jambes du danseur se croisent rapidement, et retombent, soit a la cinquieme position, soit en attitude sur une jambe, comme dans l'entrechat a cinq, a neuf, la cabriole, les brises et les ronds de jambes en l'air. Tous ces pas, finissant alors sur une jambe, doivent aussi se terminer par quelques-unes des attitudes ou arabesques indiquees precedemment. Les entrechats commencent generalement par un assemble, un coupe ou un jete; le corps s'elancant alors en l'air, les jambes passent a la cinquieme position pour se croiser et se couper. Dans les entrechats, vous pouvez couper quatre, six, huit, dix, et meme douze fois, si vous avez assez de force pour battre ces entrechats. Quelques danseurs passent des entrechats a quatorze; mais il faut pour cela des efforts d'un effet desagreable, et qui ne produisent rien autre chose sur le spectateur que l'etonnement de la force extraordinaire des muscles d'un sauteur. Quand un danseur s'efforce de passer des entrechats a un trop grand nombre de coupes, il ne peut plus les finir a temps, et son corps, sacade par des mouvements trop rapides, presente des contorsions desagreables a l'oeil du spectateur. Les entrechats les plus elegants sont a six, l'entrechat a six ouvert fait par une ouverture au troiseme coupe, et l'entrechat a huit. Les entrechats suivants: entrechat a cinq dessus, entrechat a cinq dessous; brise de cote dessus et dessous, en arriere et en avant; entrechat a cinq de cote et en arriere; sissonne battue en avant, et sissonne battue en arriere; entrechat a quatre sur une jambe, entrechat a sept en avant et en arriere; la cabriole a un et a deux temps, la cabriole italienne en avant et en arriere; les deux ronds de jambes en dehors et en dedans, etc., peuvent etre faits en tournant, excepte l'entrechat a cinq de cote et en arriere, L'entrechat a sept en avant, et la cabriole. L'entrechat a six se fait en tournant. Il ne faut pas encourager nos danseurs a faire ces efforts violents, qui, quoique naturels, sont loin d'etre gracieux. L'entrechat doit se faire avec aisance; la force du coude-pied et la tension des mollets donnent, en le faisant, une impulsion suffisante au corps; mais la facilite et l'elegance ne peuvent s'acquerir qe par l'etude et une pratique constante. Nous avons deja dit que l'on pouvait diviser les danseurs d'apres la conformation de leurs jambes, en deux especes: les danseurs clos et les danseurs arques . Comme cette conformation influe sur la maniere de battre l'entrechat et de croiser les jambes, nous allons presenter quelques observations relatives aux danseurs de ces deux classes. Danseurs clos . La contraction des muscles occasionnee par les efforts de l'elan raidit chaque articulation et force chaque partie a revenir a sa place naturelle; les genoux, ramenes alors en dedans, reprennent leur forme primitive, qui s'oppose tout-a-fait aux battements de l'entrechat. Plus les jambes se reunissent a l'extremite inferieure, plus elles sont incapables de battre ou de croiser; elles restent done sans mouvement pendant l'action des genoux, qui paraissent en consequence se frotter etrangement l'un contre l'autre; et l'entrechat, alors, n'etant ni jete , ni battu, ni croise aux pieds, ne peut avoir ni la rapidite, ni le brillant qui en font le principal merite. Une bonne methode detude, des soins et du temps, sont les seuls moyens de remedier a ce defaut. Danseurs arques . Ces danseurs sont nerveux, rapides et brillants dans tous les pas qui exigent plus de force que d'agilite: nerveux et legers, par rapport a la direction de leurs faisceaux musculaires et a la direction de leurs faisceaux musculaires et a l'epaisseur et a la resistance de leurs ligaments articulaires; rapides, parce qu'ils croisent plus du bas que du haut, leurs jambes n'ayant que tres-peu de distance pour le battement; et brillants, a raison du jour que l'on apercoit a travers les jambes croisees ou non croisees. Ce jour est precisement ce que l'on non croisees. Ce jour est precisement ce que l'on peut appeler le clair-obscur de la danse; car si le temps de l'entrechat n'est ni croise ni battu, mais au contaire cache ou frotte l'un contre l'autre, il n'y a pas de jour pour faire valoir l'ombre, et les jambes, trop rapprochees, presentent une masse peu distincte, sans brillant et sans effet. Ces danseurs sont ordinairement peu delies, parce qu'ils comptent principalement sur leur force de corps, et c'est cette force qui les empeche les plus d'acuerir du liant et de l'aisance. Leonard de Vinci nous donne une bonne definition de l'action de l'homme qui saute, et du moyen qu'il emploie pour s'elancer de terre; il fait voir la force et l'impetuosite des bras et des epaules dans leurs mouvements, et la maniere dont ils enlevent le corps apres eux; il fait ressortir la position du corps, courbe et restant gracieusement sur les hanches et sur les genoux, ce qui, par un plie, prepare a donner l'impulsion et a faciliter l'elan du coude-pied. Il faut beaucoup d'etude pour executer ces mouvements avec graace; car, sans cela, rien n'est d'un effet plus bizarre. [???]La nature instruit et agit d'elle-meme, sans le secours de la raison. Quand une personne veut sauter, elle eleve rapidement ses bras et ses epaules, qui sont mus alors simultanement en meme temps que le haut du corps, et ils restent eleves aussi longtemps qu'ils sont soutenus par ce mouvement du corps (dont les reins sont courbes), et par l'impulsion des jointures ou ressorts des cuisses, des genoux et des pieds. Cette extension se fait en deux directions, en haut et en avant; le mouvement destine a jeter le corps en avant, agit ainsi au moment de l'elan, et celui qui doit l'elever lui fait decrire un grand segment de cercle, en rendant le saut encore plus rapide. "Quand l'homme s'elance en hauteur, sa tete est trois fois plus courbee que ses talons avant que les plantes quittent la terre, et deux fois plus que ses hanches. Cela s'explique par les trois angles que l'on fait en sautant: le premier, quand le tronc est assemble en face des cuisses; le deuxieme, quand les cuisses, du cote du jarret, sont reunies aux jambes; le troisieme existe d'avance aux jointures des jambes et des coudes-pieds." ( Leon. di Vinci, Tratt. di Pittura .) Pirouette . Les pirouettes doivent leur naissance a l'avancement surprenant de la danse dans ces derniers temps. Elles etaient inconnues a Noverre et a nos anciens maitres, qui croyaient impossible de faire au-dela de trois tours sur le coude-pied. Les meilleurs danseurs du jour prouvent le contraire, par leur elevation perpendiculaire assuree, par l'equilibre constant qu'ils conservent apres avoir acheve; de sorte qu'on peut dire que l'execution des pirouettes est reellement extraordinaire. Tous les connaisseurs, j'en suis sur, reconnaitront la verite de ce que j'avance ici; ils savent par experience combien il faut de travail pour se soutenir sur une jambe,et ils comprendront combien il est plus penible de le faire sur les pointes: imaginez donc quelle difficulte il doit y avoir a tourner dans une telle position sans la moindre secousse dans aucune partie du corps. On peut raisonnablement regarder MM. Gardel et Vestris comme les inventeurs des pirouettes: ce dernier, en les perfectionnant et les diversifiant, les a mises en vogue. Les danseurs qui les ont suivis, ont perfectionne les pirouettes, et en ont perfectionne quelques-unes d'une maniere merveilleuse. Une pirouette de trois a quatre tours a la seconde position et terminee dans cette meme position ou en attitude, offre la plus grande preuve de l'aplomb du danseur. Les pirouettes demandent beaucoup d'exercice et d'etude. Celui que la nature a favorise d'un jarret souple et vigoureux peut toujours les executer avec grace; mais celui qui a de la raideur dans les hanches, dont les jambes ne sont pas assez souples pour s'ouvrir avec facilite, et qui ne peut en consequence jamais bien tourner sur le coude-pied, ne reussira jamais completement dans les pirouettes: un tel danseur doit abandonner sagement toute pretention a se distinguer dans les pirouettes elevees. Il en est de meme des danseurs arques et de ceux qui sont d'une complexion trop vigoureuse: la force de leurs muscles les prive de flexibilite et de liant,et leur corps est toujours desuni pendant qu'ils tournent. Les danseurs sveltes et clos sont beaucoup plus propres a ce genre de pas que ceux dont nous venons de parler; leurs membres sont plus souples, plus liants et en general plus tournes en dehors, trois qualites essentielles pour une bonne pirouette. La plante du pied est la vraie base sur laquelle toute notre machine est supportee. Un sculpteur travaillerait en vain s'il tentait d'asseoir une statue sur une base mobile et sans aplomb; la statue tomberait et se briserait. Par la meme raison, un danseur ne doit pas vaciller sur ce point de support, mais il doit faire usage de tous les doigts des pieds comme d'autant de branches ou racines qui, en s'etendant, embrassent le terrain sur lequel il appuie et maintiennent son corps en equilibre; il doit, en quelque sorte, s'attacher au plancher et s'y soutenir ferme et d'aplomb; s'il neglige ce soin, sa pirouette sera loin d'etre agreable; son pied se deformera et ira, en avant et en arriere, de l'orteil au petit doigt. Ce mouvement de vacillation, occasionne par la convexite des doigts de pied dans cette position, empeche toute stabilite, etles coudes-pieds, vacillant aussi, l'equilibre se perd entierement. Que votre corps soit bien d'aplomb sur les jambes avant de commencer une pirouette, et placez vos bras de maniere a donner une force nouvelle a l'impulsion qui vous fait tourner, en meeme temps qu'ils servent de contre-poids au corps qui tourne sur les pointes. Avant le commencement d'une pirouette, soit en dedans, soit en dehors, le danseur doit poser suivant l'attitude ou l'arabesque par laquelle il lui convient de terminer son enchainement. Les attitudes adoptees ordinairement dans l'execution des pirouettes sont celles de la seconde position et sur le coude-pied. Mais pourquoi les artistes se borneraient-ils ainsi a ces positions du corps pendant l'execution de leurs pirouettes? Quand un bon danseur a acquis une fois une maniere facile de tourner sur les pointes, un peu d'exercice le rend capable de tourner en arabesque ou dans toute autre attitude. Je fus un des premiers a m'ecarter de la route battue a cet egard, et, possedant une grande facilite dans l'execution des pirouettes, j'obtins quelques succes dans cette nouvelle maniere, que j'inventai et dont voici un apercu: tourner trois fois a la seconde position, placer alors les jambes et les bras en arabesque, et donner trois ou quatre fois plus de rapidite a la pirouette, en la terminant dans la meme attitude. Quand cette pirouette est correctement executee, elle est d'un effet tres-gracieux. Une autre tres-belle pirouette, aussi de mon invention, est la suivante: ayant tourne quelque temps en seconde position, changez en arabesque, etendez le corps et inclinez-le en avant le plus possible, tandis que la tete et les bras suivent gracieusement ce mouvement. Cette pirouette a quelque chose de magique; car, comme il semble a chaque tour que le corps est sur le point de tomber, on est tente de croire qu'un pouvoir invisible soutient le danseur qui contre-balance l'excentricite de la ligne de gravite par la position des bras et de la jambe, et la grande rapidite du mouvement. Je regarde cette pirouette comme la plus difficile que l'on puisse executer. Jouant un jour le role de Mercure, je pris, en tournant dans une pirouette, l'attitude de la statue de Mercure de J. Bologne; cette belle position est tres-difficile a garder. A moins qu'un danseur ne soit naturellement cambre, il ne peut jamais bien prendre cette position, et tout l'effet de la pirouette est perdu. La jambe qui est en attitude. doit etre tendue, et par son mouvement accompagner le contour arrondi de la position du corps. Pour rendre l'attitude encore plus gracieuse, que le bras gauche du danseur s'etende en portant le caducee; il previent ainsi l'angle desagreable que presente le coude, et donne plus d'elegance a sa pirouette. Dans le geste expressif de l'action, la position est commandee ne peut alors se modifier. Je terminerai en disant a l'eleve qu'il peut pirouetter en toute espece d'attitude et d'arabesque, pourvu que le dessin du corps, celui des bras et des jambes soient gracieux, et que chaque mouvement soit naturel et exempt d'affectation. On peut terminer les pirouettes dans toute sorte de position, d'attitude on d'arabesque. Voici quelques pirouettes d'espece differente : pirouettes a petits battements, sur le coude-pied; pirouettes a rond de jambe; a la seconde avec grand rond de jambe; avec foutte, pirouette en attitude, en arabesque; pirouette sur le coude-pied et en attitude, pirouette renversee, pirouettes composees , etc. CHAPITRE XI. Observations sur la danse serieuse, la danse de demi-caractere et la danse comique . C'est en vain qu'un danseur se destine au genre serieux ou heroique, s'il n'est pas doue de belles formes symetriques et d'une stature elevee, qualites indispensables pour ce genre de danse. Ceux qui sont modeles comme les statues d'Apollon, d'Antinous, de Venus ou de Diane, sont les seuls auxquels conviennent parfaitement la danse serieuse; mais leurs formes sont trop majestueuses pour le demi-caractere et la pastorale. Tous ceux qui veulent se distinguer dans cette espece d'execution doivent etre d'un port noble, elegant et eleve, rempli de graces et de dignite, mais exempt de toute affectation. Le genre serieux est le genre le plus difficile; il demande des etudes approfondies, et ne peut etre apprecie dignement que par les connaisseurs et par les hommes d'un gout pur et delicat. Les danseurs heroiques, quand ils excellent dans leur art, sont toujours les plus applaudis, et l'execution correcte d'un adagio est la pierre de touche d'un bon danseur et le nec plus ultra de notre art. Il est vraiment a regretter que le plus beau style de danse soit tellement neglige maintenant, qu'on puisse dire en quelque sorte qu'il est completement abandonne. La cause de ce facheux abandon doit etre attribuee principalement a a cette confusion des genres qui ternit a present l'art de la danse, au manque de perseverance et d'etudes de la plupart des danseurs, et a ce mauvais si apparent chez la plupart de ceux qui frequent tent le theatre. Nos maitres, ainsi que nous l'avon observe, etaient parfaits en ce genre, mais ils on en bien peu de successeurs. Un danseur heroique devrait etre parfaitement proportionne des jambes, avoir un coude-pied bien forme, et beaucoup d'aisance et de flexibility dans les hanches; sans ces qualites essentielle il ne peut reussir dans la carriere qu'il veut par courir. Dans tout autre genre de danse, ces qualites ne sont pas aussi essentielles et ne doiven pas etre portees au meme degre de perfection, et l'on n'exige pas d'un danseur, demi-caractere ou comique, la precision et la correction que l'on attend toujours d'un artiste heroique. Ce danseur doit se distinguer surtout par la dignite de la partie superieure du corps, par la combinaison la plus harmonieuse du mouvement des bras, et par le fini parfait de son execution suivant les meilleures regles de l'art. Ce genre de danse comprend les plus beaux developpements, tous les grands temps. et les pas les plus nobles; le danseur doit apporter la plus grande attention a l'elegance de son dessin, a la correction de ses poses, et a la grece de ses attitudes et de ses arabesques. Les pirouettes les plus belles, en seconde position, en attitude ou sur le coude-pied, les entrechats et tous les autres temps d'elevation, sont necessaires dans ce genre. On voit, par cet apercu, que l'execution de la danse heroique est plus compliquee que celle de nos predecesseurs, et qu'un artiste en ce genre doit posseder maintenant une perfection plus grande que l'on ne l'exigeait autrefois. Le danseur demi-caractere doit etre d'une stature et de proportions sveltes et elevantes. Ceux qui sont doues des proportions du Mercure de Canova on de son Hebe , sont bien Artages pour ce charmant genre de danse. Le demi-caractere est un melange de chaque ceux qui s'y consacrent doivent user de les temps et de tous les pas que possede l'art la danse. L'execution d'ailleurs doit etre noble elegante, les temps d'abandon executes avec quelque restriction, et une certaine dignite aimable doit accompagner toujours cette danse. Un danseur demi-caractere est principalement appele aux roles de Mercure, Paris, Zephyr, Faune, et a representer la grace et l'elegance des manieres d'un troubadour, etc. Le genre comique et pastoral doit etre le domaine des danseurs de moyenne stature qui ont du jarret et sont d'une constitution vigoureuse; et si un danseur possede, avec des formes athletiques, une taille un peu au-dessus de la moyenne, il sera parfaitement place dans les pas de caractere, qui, pour la plupart, appartiennent au genre comique. Suivant moi, le vrai type de ce genre est l'imitation de tous ces mouvements naturels que l'on a nommes danse de tout temps et La Danse . 10 chez tous les peuples. Pour offrir une peinture exacte de la vie pastorale, le danseur,dans son execution, doit copier en mime les pas, les attitudes, la simplicite de manieres, et quelquefois meme la gaite rustique des mouvements villageois, qui, inspires par le son d'instruments agrestes et animes par l'entourage et la vivacite de leurs compagnons cheris ou de leurs maitresses adorees, donnent tout essor a leur ame, sans la moindre contrainte, et s'abandonnent entierement aux plaisirs de la danse. L'eleve qui veut exceller dans ces imitations doit etudier la nature et les peintres qui ont le mieux transporte sur la toile ces interessantes images. Tous les danseurs du genre comique doivent etudier des pas de caractere, et imiter chaque espece de danse particuliere a tel ou tel pays, en donnant a leurs attitudes et a leurs mouvements le vrai type national de la danse qu'ils executent. La correction que les artistes demi-caractere doivent posseder n'est pas si rigoureuse que celle que l'on exige des danseurs du genre comique ou pastoral. Composition des Pas . Je terminerai par quelques avis qui ne seront peut-etre pas inutiles aux jeunes artistes lorsque, ayant reussi a triompher des premieres difficultes de leur art, ils desiremont s'adonner a la composition des pas. Pourquoi ne suivraient-ils pas l'exemple de Dupre, afin de hater leurs progres dans cette branche d'etudes? ce celebre danseur avait l'habitude de danser impromptu sur des airs familiers; il se rendait ainsi plus habile a creer surle-champ des pas et des enchainements, et il habituait ainsi son oreille a saisir avec la plus grande rapidite la mesure et le rhythme de la musique. Cet exercice serait extremement utile pour developper le genie d'un jeune danseur. Ses premiers essais seraient probablement incorrects, et meme quelquefois peu gracieux, mais des qu'il aurait une fois le fondement de ses pas, si je puis in m'exprimer ainsi, il pourrait ensuite les corriger et y faire tous les changements convenables jusqu'a la perfection. J'ai souvent mis en pratique ces improvisations, et j'ai quelquefois eu le bonheur de produire ainsi quelque chose de passable: cet exercice m'a servi frequemment a composer avec facilite des pas que j'avais a executer en public, et surtout quand j'avais peu de temps pour en soigner la combinaison. FIN. TABLE DES MATIERES. Pages. Preface V Chap . I er . Histoire de la danse 1 Chap . II. Utilite de la danse 8 Chap . III. Principes de la danse 11 Positions 13 Salut 13 Pas 15 Maintien 16 Chap . IV. Danses de societe 18 1. Quadrille francais 18 2. Galop 25 3. Quadrille francais croise 26 4. Quadrille des lanciers 28 5. Valse 33 6. Polka 37 7. Schottisch 39 8. Polka-mazurke 40 9. Redowa 41 10. Cotillon 44 THeORIE DE LA DANSE THeATRALE. Chap . V. Instructions generales pour les eleves 59 Chap . VI. Lecons du maitre. Nouveau mode d'instruction 70 Chap . VII. Etude pour les jambes 74 Chap . VIII. Etude pour les bras 81 Chap . IX. Etude pour le corps. Positions,poses, attitudes, etc 86 Chap . X. Etude des divers pas de la danse theatrale 92 Chap . XI. Observations sur la danse serieuse, la danse de demi-caracte re et la danse comique 107 BAR-SUR-SEINE. -IMP. SAILLARD